mardi 26 février 2013

La synecdoque : atelier d'écriture n° 10 de La Publiance


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atelier d'écriture et publication

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Atelier d'écriture n° 10



La synecdoque : « Voile à l'horizon ! » ou « Un bateau à l'horizon » ?



La synecdoque est une espèce de métonymie ; c'est une figure de rhétorique par laquelle on donne une signification particulière à un mot, qui dans le sens propre a une signification plus générale.

Dans la métonymie on prend un terme pour un autre (exemples : « boire un verre » au lieu de : « boire le contenu du verre », « vivre de son travail » au lieu de : « vivre de ce qu'on gagne en travaillant », « ameuter la ville » au lieu de : « ameuter les habitants de la ville »), au lieu que dans la synecdoque on prend le moins pour le plus, ou le plus pour le moins (le tout pour la partie, ou la partie pour le tout, le genre pour l'espèce, ou l'espèce pour le genre, la matière pour l'objet, ou l'objet pour la matière, le singulier pour le pluriel, ou le pluriel pour le singulier). Exemples : « une voile à l'horizon » pour « le bateau », « les flots » pour « la mer », « l'airain » pour « les canons », « les mortels » pour « les hommes », « un fer » pour « une épée », « des porcelaines de Chine » pour « des récipients en porcelaine de Chine », « l'ennemi » pour « les ennemis », « porter un castor » pour « porter une toque en fourrure de castor », etc.

Les deux termes de la synecdoque (celui qui est normalement attendu mais qui n'apparaît pas, et celui qui se substitue au terme attendu) ont un rapport de contiguïté et d'inclusion, car non seulement ils font partie de la même isotopie (secteur du réel), mais l'un inclus l'autre.

Le mot féminin synecdoque représente la réfection de sinodoche (en linguistique, la réfection est la modification d'une forme linguistique populaire, issue de l'évolution normale, d'après l'étymologie ; le XVIe siècle a procédé à de nombreuses réfections de mots d'après le latin ou le grec), emprunté au bas latin synecdoche, repris du grec sunekdokhê « compréhension simultanée de plusieurs choses », lui-même dérivé de sunekdekhesthai « se rendre maître en même temps, comprendre à la fois » verbe composé de sun « avec, ensemble » et de ekdekhesthai « recueillir dans son esprit, saisir, comprendre », lui-même formé de ek- (qui marque l'origine) et de dekhesthai « recevoir », lequel se rattache à une importante racine indoeuropéenne exprimant l'idée de conformation, d'adaptation.


Résumé étymologique :

sun (avec, ensemble) + ekdekhesthai (ek (qui marque l'origine) + dekhesthai (recevoir)

-> sunekdekhesthai (se rendre maître en même temps, comprendre à la fois)

-> sunekdokhê (grec)

-> sinodoche (1521)

-> synecdoche (1690, forme latine)

-> synecdoque (par réfection, 1730, César Chesneau Dumarsais (grammairien français, 1676-1756).


L'emploi de la synecdoque permet des descriptions réalistes, des portraits, des récits en prose ou en poésie. La synecdoque correspond à une perception du monde qui procède du particulier au général ou du général au particulier. Le rapport sémantique entre les deux termes ou les deux notions est un rapport d'inclusion : la partie dans le tout, où le détail suggère l'ensemble, ou bien inversement la partie par le tout.


On parle de synecdoque particularisante (le détail suggère l'ensemble) lorsqu'on effectue un zoom avant (impression de gros plan, valorisation d'un élément), et de synecdoque généralisante (zoom arrière, recul, éloignement, distanciation, généralisation). Exemples : « Le buste survit à la cité » Théophile Gautier (1811-1872), où l'élément particulier « Le buste » remplace l'ensemble « sculpture » ; « Les plus fines cravaches du monde entier vont s'entraîner là-bas », où l'élément particulier « cravaches » remplace l'ensemble « les jockeys ». Inversement : « Il porte un feutre » est une synecdoque généralisante, où l'ensemble « feutre » remplace l'élément particulier « chapeau ».

La synecdoque est une figure non absolue, mais relative. Dire « le bâtiment » pour désigner une maison est une synecdoque généralisante, mais dire « la maison » pour désigner un chalet ou une cabane par exemple, est aussi une synecdoque généralisante. Tout dépend des repères qui sont pris, et du contexte, dont dépend toute valeur (linguistique et sémantique). Cette dernière est constamment variable, un même mot ayant toujours un nouveau sens dans un nouveau contexte.


Dans le texte, la synecdoque traduit très souvent un retour à une impression ou à une perception plus sensible et physique du monde. Elle joue sur les rapports respectifs de l'ensemble et du détail, elle va de l'un à l'autre, suggère l'un par l'autre et inversement. Elle est toujours très visuelle, car elle fait constamment varier la distance de perception des choses, la distance du locuteur d'avec les choses perçues, dans le langage et dans l'esprit, par une comparaison constante entre ce que l'on perçoit du visible (les objets, les formes, le cadre, les couleurs, les contrastes, etc.) et ce que l'esprit en fait ensuite.


Consigne : remplacer les mots soulignés du texte ci-après par des synecdoques.


Les Russes avançaient dans la pénombre. Julien, qui écoutait de ses deux oreilles, les a entendus venir. Il ne savait pas s'ils venaient porter la destruction et l'incendie, ou au contraire le réconfort. Comment opposer à la guerre un message de paix ? Julien a secoué ses amis. Il s'est habillé le premier, suivi par l'originaire de Provence et l'originaire d'Aquitaine. Il valait mieux ne pas risquer sa vie !


Les Russes = les soldats rouges

écoutait de ses deux oreilles = l'oreille attentive

la destruction et l'incendie = le fer et le feu


Les soldats rouges avançaient dans la pénombre. Julien, l'oreille attentive, les a entendus venir. Il ne savait pas s'ils venaient porter le fer et le feu, ou au contraire le réconfort.

Etc.



À vous de jouer,

À vos claviers, plumes et stylos !




Bibliographie :


> BOURDEREAU, Frédéric, FOZZA, Jean-Claude, [et al.], 1996. Précis de français : langue et littérature. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), p. 34.



> DUBOIS, Jean, GIACOMO, Mathée [et al.], 1999. Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage. Paris, Larousse, p. 464.



> Le Grand Robert de la langue française, 2001, 2e éd. 6 vol., t. 4, p. 1424, t. 6, p. 937.



> GREVISSE, Maurice, 1993. Le bon usage : grammaire française. Paris, Duculot. 13éd., p. 263.



> LITTRÉ, Paul-Émile, 1991 (1866-1877). Dictionnaire de la langue française. Chicago, Encyclopaedia Britannica Inc. Nouv. éd. 6 vol. + 1 supplément, t. 6, p. 6155.



> Le Petit Robert des noms propres, 2007.



> PEYROUTET, Claude, 1994. Style et rhétorique. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), p. 62.



> REY, Alain (dir.), 1994. Dictionnaire historique de la langue française. Paris, Le Robert. 2 vol., p. 2066.



> THERON, Michel, [199-?]. 99 réponses sur les procédés de style. Montpellier, Réseau CRDP/CDDP (Centre Régional de Documentation Pédagogique/Centre Départemental de Documentation Pédagogique du Languedoc-Roussillon) du L.-R. Fiches 37, 48.



Contact : numencegalerielitteraire@gmail.com



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