lundi 4 mars 2013

La métonymie : atelier d'écriture n° 11


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atelier d'écriture et publication

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Atelier d'écriture n° 11



La métonymie : « Elle est tombée

dans les pommes »,

au sens propre ou au figuré ?



La métonymie, dont la synecdoque en est une forme particulière (voir l’Atelier d’écriture précédent), est une figure de rhétorique par laquelle on met un mot à la place d’un autre dont il fait entendre la signification. Elle est tombée dans les pommes ne signifie pas qu’une personne soit littéralement tombée dans un tas de pommes (sens propre), mais qu’une personne s’est évanouie (sens figuré).



En ce sens général, la métonymie serait un nom commun à tous les tropes (un trope est une figure de mots employés au sens figuré ; une expression employée dans un sens figuré ; Trope a fini par s’appliquer à toutes les espèces de figures qu’on peut considérer comme un détournement du sens du mot). Mais l’on restreint la métonymie aux usages suivants :



> la cause pour l’effet (par exemple : Montrez-moi votre travail, pour : Montrez-moi LE RéSULTAT de votre travail),

> l’effet pour la cause (par exemple : La récolte a été catastrophique cette année, où La récolte désigne le produit de la cueillette et non pas seulement l’action de cueillir),

> le contenant pour le contenu (par exemple : Boire un verre, pour : Boire l’eau contenue dans le verre),

> le nom du lieu où une chose se fait pour la chose elle-même (par exemple : Toute la salle applaudit, pour : Tous les gens présents dans la salle applaudirent ; ou bien : Du Hollande, pour : Du fromage de Hollande ; ou bien : Un camembert, pour : Un fromage fabriqué près de Vimoutiers, dans l’Orne, à Camembert),

> le signe pour la chose signifiée (par exemple : l’aigle pour l’Allemagne),

> le nom abstrait pour le concret (par exemple : Une fois l’insulte reçue de plein fouet, il mit son honneur de côté, pour : L’insulte reçue de plein fouet, il ne répondit rien et il partit ; ou bien : Toute honte bue),

> les parties du corps regardées comme le siège des sentiments ou des passions, pour ces passions et ces sentiments (par exemple : Il lui mit le cœur sens dessus dessous, pour exprimer un désordre amoureux ; ou bien : Je sais ce qu’à mon cœur coûtera votre vue),

> le nom du maître de la maison pour la maison même (par exemple : Je reviens de chez Duchemin, pour : Je reviens de la maison des Duchemin ; ou bien : Des gravures que je portais à l’encadreur, pour : Des gravures que je portais à l’atelier d’encadrement),

> l’antécédent pour le conséquent, ou le conséquent pour l'antécédent (dans l'exemple : Il est mort, on peut dire : Il a vécu (on dit ce qui précède), ou Nous le pleurons (on dit ce qui suit).



Le nom féminin métonymie est la réfection savante au XVIIe siècle (attesté dès 1690) de méthonomie (1521), emprunt au bas latin de même sens metonymia, calque du grec metônumia, formé de meta- (au milieu de, parmi, avec) et de onoma (nom), apparenté au latin nomen, qui est représenté en français dans de nombreux mots en –onyme (comme synonyme, qui signifie de même sens, ou antonyme, de sens contraire, etc.), ainsi que dans onomatopée (imitation phonétique de la chose dénommée, atchoum pour l’éternuement, boum ! pour une explosion, etc.).



Le procédé métonymique, qui est changement de nom, consiste donc à prendre un mot pour un autre auquel il est lié par un rapport logique.

Depuis les formalistes russes et spécialement Roman Jakobson en 1935 (linguiste américain d’origine russe, 1896-1982, dont l’activité interdisciplinaire (anthropologie, folklore, psychanalyse, théorie de l’information) lui permit de proposer nombre d’hypothèses et de modèles stimulants ; sa pensée influença notamment celle de Noam Chomsky, 1928-), le procédé métonymique désigne toute figure par laquelle le sens est transféré d’un signifié à un autre, lié par un rapport de contiguïté ou de dépendance logique.



La métonymie repose sur un déplacement de la référence que le contexte permet d’expliciter : Rencontrer Montaigne dans ses lectures, est spontanément entendu pour : Rencontrer la pensée ou l’œuvre de Montaigne (et non pas rencontrer l’homme, mort en 1592 !). Il s’agit bien d’une « extension de sens qui consiste à nommer un objet au moyen d’un terme désignant un autre objet uni au premier par une relation constante »,

extrait de : Grammaire historique de la langue française, de Kristoffer Nyrop (philologue danois, 1858-1931).



La métonymie est donc fondée sur un rapport entre des réalités extralinguistiques, indépendamment des éléments linguistiques qui l’expriment ; dans chaque cas, il y a ellipse (boire un verre, c’est boire le CONTENU d’un verre).

Le processus métonymique pris au sens large, comme l’histoire des mots, permet d’évoquer l’histoire de la civilisation, les significations contemporaines d’un mot ayant fait perdre toute trace des premiers emplois.



Que l’on pense à bureau, qui désigna d’abord une étoffe de bure, puis par métonymie un tapis de cette étoffe recouvrant une table et la table ainsi recouverte ; ces emplois sont sortis d’usage avec l’évolution du mobilier et le changement des habitudes sociales : par de nouvelles métonymies, bureau est devenu le nom d’une table à écrire, de la pièce où elle se trouve, d’un établissement ouvert au public, la désignation d’un lieu de travail, etc., mais le lien entre le sens de table, toujours vivant, et celui d’établissement, est ténu.



Consigne : ce début de poème extrait de : Corps et biens, de Robert Desnos (poète français, 1900-1945, qui s’affirma dans la lignée du romantisme nervalien comme l’un des maîtres de la poésie onirique) accumule les expressions métonymiques tirées de la langue populaire (les métonymies sont soulignées). Essayer de le continuer en trouvant d’autres métonymies. Le poème en entier sera donné lors du prochain atelier (Atelier d'écriture n° 12).


C’était un bon copain

Il avait le cœur sur la main

Et la cervelle dans la lune



C’était un bon copain

Il avait l’estomac dans les talons

Et les yeux dans nos yeux



C’était un triste copain

Il avait la tête à l’envers




À vous de jouer,

À vos claviers, plumes et stylos !





Bibliographie :



> BOURDEREAU, Frédéric, FOZZA, Jean-Claude, [et al.], 1996. Précis de français : langue et littérature. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), p. 34.



> DUBOIS, Jean, GIACOMO, Mathée [et al.], 1999. Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage. Paris, Larousse, p. 302.



> Le Grand Robert de la langue française, 2001, 2e éd. 6 vol., p. 1424.



> GREVISSE, Maurice, 1993. Le bon usage : grammaire française. Paris, Duculot. 13éd., pp. 263, 721.



> LITTRÉ, Paul-Émile, 1991 (1866-1877). Dictionnaire de la langue française. Chicago, Encyclopaedia Britannica Inc. Nouv. éd. 6 vol. + 1 supplément, t. 4, p. 3870, t. 6, p. 6502.



> Le Petit Robert des noms propres, 2007.



> PEYROUTET, Claude, 1994. Style et rhétorique. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), pp. 64-65.



> REY, Alain (dir.), 1994. Dictionnaire historique de la langue française. Paris, Le Robert. 2 vol., p. 1232.



> THERON, Michel, [199-?]. 99 réponses sur les procédés de style. Montpellier, Réseau CRDP/CDDP (Centre Régional de Documentation Pédagogique/Centre Départemental de Documentation Pédagogique du Languedoc-Roussillon) du L.-R. Fiche 40.



Contact : numencegalerielitteraire@gmail.com



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