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L
a - P U B L i
a n c e
atelier
d'écriture et publication
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e n - l i g n e . . .
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Atelier d'écriture n° 17
La
litote : « Le
loup
n'est
pas un
gentil
petit
animal
de compagnie... »,
et
la prétérition : « Je ne vous dirai pas combien j'ai été
affectée par
cette nouvelle »
La
prétérition est une figure de rhétorique dans laquelle on
feint de passer sous silence ce sur quoi on attire l'attention, une
figure dans laquelle on feint de ne pas vouloir dire ce que néanmoins
on dit clairement et même avec force. Par exemple : « Je
ne vous dirai pas combien j'ai été affectée par cette nouvelle ».
L'atténuation est absolument illusoire et
l'énonciation (« Je ne
vous dirai pas ») contredit l'énoncé.
La
prétérition est une contradiction : ce qui est
sous-entendu est le contraire de ce qui est dit.
On
parle aussi de paralipse (figure du discours par laquelle le
locuteur met en relief une idée en prétendant ne pas la
développer) et de prétermission (forme vieillie de
prétérition).
Le
nom féminin la prétérition est emprunté à la
Renaissance (1510) au bas latin praeteritio, -onis, désignant
l'action de passer devant, spécialement, au figuré, le fait
de passer sous silence sur son testament et, en rhétorique, de
déclarer que l'on ne parle pas d'une chose.
Le
mot a été repris avec son sens juridique (le gascon utilise
pretericion dès 1314) et a retrouvé au XVIe
siècle (1577) son acception spéciale en rhétorique (figure par
laquelle on parle d'une chose en déclarant qu'on n'en parlera pas)
remplaçant prétermission.
***
La
litote est une figure de rhétorique qui consiste à dire le
plus en disant le moins. C'est une figure de la réticence, de
l'atténuation, de l'affaiblissement de la pensée, par une
restriction volontaire du discours.
Dans
la litote, il ne s'agit pas d'exprimer le « degré »
d'un sentiment, mais sa « présence »
(essentielle). Elle est une opération bien plus mentale que
visuelle.
Elle
est un détour intellectuel, dont l'origine est la pudeur ; elle
est une figure de pensée où
la sobriété, la mesure et la pudeur sont de rigueur, même feintes.
Si
par sa lettre, elle est une diminution du sens, par son
esprit, elle en est une majoration, et peut être comprise
comme hyperbolique. Quand on minimise le signe, on intensifie l'effet
restant. Exemples :
Ce
n'est pas mal (pour : C'est
très bien).
Ce
n'est pas triste (pour : C'est
très gai).
Va,
je ne te hais point (pour : Je
t'aime), extrait du : Cid, de Corneille.
Il
a su me toucher (pour : Il
m'a bouleversée).
Ce
n'est pas mauvais (pour : C'est
très bon).
Ce
spectacle n'est pas sans intérêt (pour : Ce
spectacle est très intéressant).
Je
crois qu'il ne m'est pas indifférent (pour : Je
suis sûre qu'il me plaît).
Ça
n'est pas pour me déplaire (pour : Ça
me plaît beaucoup).
Le
nom féminin la litote, d'abord écrit liptote
(1521), puis refait en litote (1730), est emprunté au bas
latin des grammairiens litotes, lui-même pris au grec litotês
(simplicité, absence d'apprêt), en rhétorique figure
laissant entendre plus que l'on ne dit. Le mot dérive de litos
(simple), employé à propos de vêtements, de la nourriture
(encore en grec moderne : frugal), de la manière de
vivre, du style et même de personnes. Cet adjectif appartient au
groupe de lis (lisse)
dont la racine °lei-,
li- ne semble pas se
retrouver dans d'autres langues.
Le
mot dénomme un procédé stylistique qui consiste à dire moins pour
faire entendre plus et, par métonymie, l'expression qui applique ce
procédé (1867).
L'adjectif
rare et didactique litotique
est employé par Roland Barthes (1953, litotique :
qui utilise la litote, style litotique)
[critique et sémiologue français, 1915-1980, professeur au Collège
de France à partir de 1976].
La
litote est fréquente dans la littérature classique
(pudeur des sentiments, respect des bienséances) et chez certains
auteurs contemporains comme
Albert Camus [écrivain
français, 1913-1960, prix Nobel de littérature en 1957 ;
d'après lui, la littérature, la politique ou la métaphysique ne
produisent que des illusions dont il faut prendre conscience pour
tenter de forger, au gré des engagements, sa propre liberté ;
c'est pour traduire cette pensée que son style dépouillé donne
l'illusion de la neutralité] ou
Marguerite Duras [écrivain
et cinéaste française, 1914-1996, prix
Goncourt en 1984 avec L’Amant].
La
litote est une atténuation
concernant l'énonciation d'un message. En
décidant d'écrire en deçà
de sa pensée et de ses sentiments, un auteur peut choisir d'employer
la litote et l'euphémisme
(qui sont deux écarts de style, l'euphémisme ayant comme rôle
d'adoucir des idées déshonnêtes, désagréables, dures ou
tristes),
ou
bien il peut choisir de pratiquer l'exténuation
(atténuation d'un texte entier), par
exemple : « C'est
un film parfois un peu simple, plus proche d'un mélodrame que d'une
tragédie racinienne. Il ne suscite pas l'enthousiasme, on peut même
ne pas le voir »
pour : « Ce
film est franchement simpliste, schématique comme un mélodrame,
sans intérêt »,
ou
même rechercher un style « blanc ».
Une écriture et un style
sont appelés « blancs »
lorsque l'auteur livre un
minimum d'idées et de sentiments, avec le minimum de moyens
syntaxiques – phrases simples, courtes et laconiques – comme s'il
n'était pas impliqué ; ce
type de style, qui minore la présence de l'émetteur, accroît
l'importance de l'énoncé ; les silences créent des effets de
distanciation ; le lecteur, intrigué, s'efforce de les
interpréter.
***
Consignes :
1.
Dans cet extrait de L’Amant,
de Marguerite Duras, transformer le style « blanc » de
l'auteur en imaginant (et en les intégrant au texte) les paroles,
les pensées, les idées, les émois ou les sentiments des
personnages, et en intégrant
des prétéritions (Je
ne dirai rien de son élégance,
qui... ; Je
ne parlerai pas de... ;
Sans
insister sur sa
timidité,
qui... ; Sans
compter que...).
L'homme
élégant est descendu de la limousine, il fume une cigarette
anglaise. Il regarde la jeune fille au feutre d'homme et aux
chaussures d'or. Il vient vers elle lentement. C'est visible, il est
intimidé. Il ne sourit pas tout d'abord. Tout d'abord il lui offre
une cigarette. Sa main tremble. Il y a cette différence de race, il
n'est pas blanc, il doit la surmonter, c'est pourquoi il tremble.
Elle lui dit qu'elle ne fume pas, non merci. Elle ne dit rien
d'autre, elle ne lui dit pas laissez-moi tranquille.
2.
À l'inverse de l'exercice précédent, transformer l'extrait suivant
de Le Silence de la mer,
de Vercors, en lui conférant un style « blanc » (phrases
simples et courtes, réduction de l'information, distanciation,
sobriété des moyens stylistiques, etc.)
Le
petit garçon mit sa petite main dans celle de son père sans
s'étonner puisque c'était déjà une vieille habitude. J'aime bien
la main de mon père, elle est chaude et douce, bien plus grande que
la mienne, elle est forte et moi je suis tout petit, pensait-il.
Toutefois, il se rendait compte qu'il y avait bien longtemps qu'il ne
l'avait pas fait. Ils sortirent du jardin et il vit que Maman avait
mis un pot de géranium à la fenêtre de la cuisine, comme elle le
faisait habituellement, quand papa sortait. Il aimait bien le rouge
des pétales à côté du vert nénuphar des grands feuilles
crénelées. C'était un peu drôle. Il faisait un temps splendide.
Certes, il y avait des nuages, mais ils étaient informes et tout
effilochés. Le petit garçon n'avait pas envie de les regarder. Il
regardait le bout de ses petits souliers plein de poussière – il
avait oublié de les décrasser hier au soir après qu'il était
rentré d'une course dans les champs boueux – il regardait le bout
de ses petits souliers qui chassaient devant eux les graviers de la
route. Papa regardait en coin les pas qu'il faisait, sans être dupe
du jeu avec les cailloux et il ne disait rien, alors que d'habitude
il se fâchait quand il entendait ce bruit-là.
Cela
pourrait donner ces résultats-là :
Texte
1 :
L'homme
élégant est descendu de la limousine, il fume une cigarette
anglaise. Je ne dirai rien de son élégance, qui, sans être
outrancière est un peu tape à l’œil. On s'aperçoit vite qu'il
aime porter son costume de lin blanc comme une armure, comme un
repoussoir, comme un décor, complété par la cigarette qu'il porte
à sa bouche lentement, nonchalamment, précieusement, installant une
distance infinie, le croit-il volontiers, entre lui et les autres. Et
pourtant ses pensées sont à l'opposé de ce qu'il laisse paraître.
Je connais cette jeune fille, je la connais même depuis très
longtemps. Comment s'appelle-t-elle, déjà ? Clarisse ?
Émeline ? Hortense, oui c'est bien son prénom, comme le nom
d'une fleur, Hortense... Il regarde la jeune fille au feutre d'homme
et aux chaussures d'or. Il vient vers elle lentement. Sans insister
sur sa timidité qui est aussi visible que palpable, je ne parlerai
pas de sa pudeur maladive qui le fait repousser tout contact humain.
Il ne sourit pas tout d'abord. Tout d'abord il lui offre une
cigarette. Sa main tremble. Elle est si jeune et si fraîche,
existerait-il un lien entre nous deux ? pourquoi elle ?
pourquoi moi ? par quel mystère éprouvant et inhumain
sommes-nous mystérieusement attachés, Hortense et moi. Il y a cette
différence de race, il n'est pas blanc, il doit la surmonter, c'est
pourquoi il tremble. Elle lui dit qu'elle ne fume pas, non merci.
Elle ne dit rien d'autre, elle ne lui dit pas laissez-moi tranquille.
Elle aime son regard doux et bienveillant, quoique inquiet. Elle ne
comprend pas son inquiétude.
Texte
2 :
Le
petit garçon mit sa main dans celle de son père sans s'étonner.
Pourtant, il y avait longtemps, pensait-il. On sortit du jardin.
Maman avait mis un pot de géranium à la fenêtre de la cuisine,
comme chaque fois que papa sortait. C'était un peu drôle. Il
faisait beau, - il y avait des nuages, mais informes et tout
effilochés, on n'avait pas envie de les regarder. Alors le petit
garçon regardait le bout de ses petits souliers qui chassaient
devant eux les graviers de la route. Papa ne disait rien. D'habitude
il se fâchait quand il entendait ce bruit-là.
À vous de jouer,
À vos claviers, plumes
et stylos !
Bibliographie
:
>
DUBOIS, Jean, GIACOMO, Mathée [et al.], 1999. Dictionnaire
de linguistique et des sciences du langage.
Paris, Larousse, pp.
288, 379.
> Le
Grand Robert de la langue française,
2001, 2e éd.
6 vol., t.
4, p. 865, t. 5,
p. 1179.
>
LITTRÉ, Paul-Émile, 1991 (1866-1877). Dictionnaire
de la langue française.
Chicago,
Encyclopaedia Britannica Inc. Nouv. éd. 6 vol. + 1 supplément, t.
4, p. 3554, t.
5, p. 4983.
> Le
Petit Robert des noms propres,
2007.
>
PEYROUTET, Claude, 1994. Style
et rhétorique.
Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), p.
72.
> REY,
Alain (dir.), 1994. Dictionnaire
historique de la langue française.
Paris, Le Robert. 2 vol., pp.
1137, 1626.
>
THERON, Michel, [199-?]. 99
réponses sur les procédés de style.
Montpellier, Réseau CRDP/CDDP (Centre Régional de Documentation
Pédagogique/Centre Départemental de Documentation Pédagogique du
Languedoc-Roussillon) du L.-R. Fiches
90, 91.
Contact
: numencegalerielitteraire@gmail.com
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