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L
a P U B L i
a n c e
atelier
d'écriture et publication
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e n l i g n e . . .
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Atelier
d'écriture n° 26
Dénotation-connotation,
monosémie
et polysémie
Un
mot peut avoir un seul sens (monosémie) ou plusieurs sens
(polysémie) et ce mot peut être pris séparément ou associé
à d'autres. Seul ou associé à d'autres mots, un mot peut avoir un
sens premier (on parle alors de dénotation) ou un second
sens, voire un troisième, etc. (on parle alors de connotation).
Le
langage, ne pouvant avoir autant de mots qu'il y a d'objets à
désigner ou d'idées à exprimer, doit suppléer à cette
insuffisance en donnant à un même mot plusieurs sens.
Nettoyage
des accessoires de votre presse-agrumes
Pour
le premier entretien, un rinçage à l'eau chaude suffit. Par la
suite, vous pouvez mettre les accessoires au lave-vaisselle dans le
panier du haut. N'utilisez ni éponge abrasive, ni tampon métallique,
ni eau de javel pour nettoyer les accessoires, le bol et les
couvercles.
Cet
extrait du mode d'emploi d'un robot ménager presse-agrumes est un
énoncé strictement monosémique, où le sens objectif de chaque mot
sert à transmettre un message d'un grande précision et d'une grande
justesse techniques, indispensable à sa bonne compréhension.
Un
mot est dit monosémique
lorsqu'il n'a qu'une seule
signification, une seule acception -
et non pas accepTAtion, quels que soient les contextes dans lesquels
on l'emploie (par exemple : un
séquoia = grand
conifère de Californie, un
dégât = destruction
causée par un accident, etc.).
La plupart des termes appartenant aux terminologies scientifiques
n'ont qu'un sens (par exemple : laryngologie,
névralgie, pluviométrie, etc.).
On
distingue deux cas
de monosémie.
Premièrement, lorsque dans le dictionnaire, certains mots ont un
seul sens dénoté (le sens
objectif),
par exemple : dégivrer
= enlever
le givre, un
féculent = légume
qui contient de la fécule, etc.
Deuxièmement,
lorsque d'autres mots, dotés de plusieurs
sens dénotés (donc polysémiques)
dans le dictionnaire, n'en conservent qu'un seul dans un énoncé
(par exemple dans la phrase : J'ai
mangé un croissant chaud, où le
croissant n'est évidemment pas
celui de la lune, mais bien une pâtisserie feuilletée en forme
d'arc de cercle).
Énoncé
monosémique : Allongé
dans le noir, il gardait les yeux ouverts tout en écoutant le
silence de la chambre.
Énoncé
polysémique : Ses
yeux naviguaient dans le noir, ses oreilles s'emplissaient de noir.
Il respirait, il happait du noir à pleine bouche, à pleines
narines.
Extrait
de : La neige en deuil
(1952, p. 49), de Henri Troyat
[romancier, essayiste et auteur
dramatique français d'origine russe, 1911-2007,
entré à l'Académie française en 1959].
Un
mot est polysémique
lorsqu'il porte au moins deux
significations (par exemple :
pétiller,
qui signifie aussi bien Faire
des petits bruits secs et répétés
comme dans : « Le feu pétille
dans la cheminée », que Faire
des petites bulles de gaz comme
dans : « Cette boisson pétille
trop, ça pique ! », ou encore
que Briller
d'un vif éclat comme dans « Ses
yeux pétillent de bonheur ».
Le
concept de polysémie s'inscrit dans un double
système d'oppositions :
l'opposition entre polysémie et
homonymie
(par exemple : dessin
et dessein
qui malgré une étymologie commune sont traités en pratique comme
deux unités distinctes, donc
comme des homonymes
; ou encore LE
pendule
et LA
pendule,
le
pot
et la
peau,
etc.), et l'opposition entre
polysémie et monosémie
: cette deuxième opposition est semblable à l'opposition mot/terme,
où le mot emprunté au vocabulaire en général peut être
polysémique, et où le même mot devient un terme, avec une seule
signification, par exemple dans une terminologie scientifique
(exemple avec le mot polysémique
fer
= métal,
objet, matière, qui devient en
chimie le terme monosémique
fer,
symbolisé Fe).
On
distingue trois types de polysémie :
>
Premièrement, la polysémie par
dénotation, lorsqu'un mot offre
plusieurs sens dénotés
(exemples : croissant
= quartier
de lune - pâtisserie feuilletée en forme d'arc de cercle
; peuple
= ensemble
des habitants d'un même pays - ensemble des citoyens de condition
modeste).
>
Deuxièmement, la polysémie
par addition d'un sens dénoté (sens
premier, objectif) et
d'une ou plusieurs connotations
(sens seconds, subjectifs). Exemple : or
= métal
précieux, monnaie - Affaire
en or (affaire
très avantageuse) - Âge
d'or (époque
de bonheur) - À
prix d'or (très
cher) - Cœur
d'or (personne
généreuse) - Livre
d'or (recueil
de signatures), etc.
>
Troisièmement, la polysémie
par écart de style, lorsque l'écart
consiste en une substitution d'un mot
par un autre, que le mot exprimé
perd son sens dénoté
(objectif) pour prendre celui du mot
remplacé, et que ses connotations
sont les siennes propres et celles du mot remplacé.
Exemple : dans l'expression « L'offensive
du froid » qui
désigner une chute brusque de la température de l'air,
le terme offensive
perd son sens dénoté (attaque
contre quelqu'un ou quelque chose),
capte celui de forte
poussée, et se charge des
connotations de l’agressivité
guerrière et de la rapidité.
Le
mot féminin connotation
est emprunté (1660) au latin scolastique connotatio
(indication seconde,
signification seconde).
Le mot apparaît chez les auteurs de la Grammaire
de Port-Royal [ou
Grammaire générale et raisonnée
(application de la doctrine cartésienne à l'analyse du langage,
publiée en 1660), de
Antoine Arnauld, théologien français (1612-1694) et Claude
Lancelot, religieux janséniste et grammairien français (1615-1695)]
avec le sens de propriété
d'un terme de faire connaître en même temps que son objet certains
attributs du sujet, lequel est
aujourd'hui réservé à l'histoire des sciences. Il est repris à
l'anglais connotation,
traduit en français en 1866, et
employé par le logicien John
Stuart Mill
[philosophe et économiste britannique,
1806-1873], pour désigner les traits
de signification intrinsèques d'un mot qui renvoient à des
attributs seconds par opposition aux traits principaux.
Plus récemment, il a été repris aux linguistes américains (1954,
Louis Hjelmslev
en français [linguiste danois,
1899-1965]) pour désigner des traits
de signification qui relèvent du contexte particulier de l'emploi
d'un mot.
Connotation
se dit du sens particulier
que prend un mot ou un énoncé en
fonction du contexte situationnel ;
la connotation s'oppose à la dénotation
qui désigne l'élément invariant de signification ; ainsi
l'adjectif sage,
appliqué à ce
qui est fait avec discernement et prudence
(dénotation), s'emploie souvent avec la connotation absence
d'originalité.
Le
nom féminin dénotation
est emprunté (vers 1420) au dérivé latin impérial denotatio
(indication).
Il a suivi une évolution parallèle à celle du verbe dénoter.
Le verbe transitif dénoter
est emprunté (vers 1160) au latin denotare
(faire connaître).
D'abord attesté au sens ancien de remarquer,
le mot a pris la valeur de désigner,
dénoncer (1350). Il s'est
spécialisé en logique (1375) où, par opposition à connoter,
il désigne le fait de renvoyer à
l'extension d'un terme.
Par
opposition à la dénotation,
contenu objectif, neutre, du message, on appelle connotation
ce que l'expression ajoute à ce contenu objectif. Par exemple les
mots gifle
et soufflet
qui désignent tous les deux un
coup sur la joue, ont la même
dénotation, mais diffèrent par la connotation.
Les
rapports entre sens dénoté et connotations obéissent à une
logique de l'inconscient.
Le plus souvent, ils sont de l'ordre de la synecdoque
(la partie/le tout), de la métonymie
(la cause/l'effet, rapport de contiguïté), de la métaphore
(rapport de ressemblance) ou
de l'antithèse
(rapport d'opposition). Exemples :
un sabot
peut évoquer la campagne
par synecdoque et la bergère
par métonymie, une chevelure
blonde peut évoquer un champ
d'épis de blé mûrs par
métaphore.
Les
connotations peuvent avoir quatre
origines : la nature
psychologique de l'homme, son
environnement social,
son histoire personnelle,
et dans le cas d'un texte, les interrelations
des mots et des phrases.
Le
texte connotatif mobilise le lecteur
et l'interpelle. Le lecteur ne peut
pas se contenter d'un sens seulement dénoté. Au-delà, il découvre
et décode les connotations dont le texte et l'auteur sont porteurs.
Il peut aussi, éventuellement, apporter ses propres connotations,
enrichir celles du texte et de l'auteur, et devenir ainsi une sorte
d'acteur sensible.
Exemple
avec cet extrait de : Les Beaux
Quartiers (1936), de Louis
Aragon [écrivain
et poète français, 1897-1982, fonde avec André Breton, Paul Éluard
et Philippe Soupault en 1923 le mouvement surréaliste] :
(…)
et, au-delà du quartier militaire, vers la Seine, il y a de grands
silences
abandonnés, car ici, passées de petites
entreprises,
commencent de longs murs enfermant des usines.
Les
mots silences,
petites
entreprises
et usines
sont
connotés. Les connotations de silences
sont : solitude,
inquiétude, nuit,
et elles ont pour origine le contexte. Les connotations de petites
entreprises
sont : la
taille artisanale, rassurante, évoquant le passé,
et elles ont pour origine le contexte mais aussi l'environnement
social à travers l'histoire du monde industriel. Les connotations de
usines
sont : bâtiments
de grandes dimensions, univers de l'aliénation, inhumanité,
et elles ont pour origine le contexte mais aussi l'environnement
social, et pour certains, l'histoire personnelle.
Consigne
: donner le(s) sens dénoté(s) des mots suivants : courant,
été, canon, bleu, puis trouver
des connotations suggérées par chacun
de ces mots ou
par leur(s) association(s). Puis écrire
deux textes assez courts, l'un avec le(s) sens dénoté(s) des mots,
l'autre avec des connotations choisies parmi celles qui auront
été trouvées précédemment.
Cela
pourrait donner ceci :
>
courant. Sens dénotés : mouvement de l'eau - électricité qui
passe dans les fils - être informé de quelque chose (au courant) -
pendant une période (dans le courant de la semaine prochaine).
Connotations suggérées : le mouvement, le sens, la direction, la
force, la tension, l'énergie, l'action de s'informer, se mettre au
parfum, le manque d'information, être dans le secret, rester en
dehors, une date approximative ou floue ou vague, un non-engagement,
la liberté de mouvement.
>
été. Sens dénoté : saison. Connotations suggérées : joie,
soleil, vacances, voyage, repos, loisirs, famille.
>
canon. Sens dénotés : arme - règle - chant à deux ou plusieurs
voix. Connotations suggérées : guerre, carnage, agression, western,
tragédie, mort, blessures, normes, beauté, principes rigides,
majorité, groupe d'individus, chorale d'enfants, chants religieux.
>
bleu. Sens dénotés : couleur - bifteck à peine cuit - marque sur
la peau causée par un coup - vêtement de travail - fromage -
débutant. Connotations suggérées : ciel dégagé, beau temps,
la
tranquillité,
un
regard
vif,
maisons grecques, mer calme, gourmandise carnivore, appétit
carnassier, violence, agressivité, long labeur, uniforme de
l'ouvrier, bleu de Bresse, bleu d'Auvergne, plateau de fromages au
restaurant, policier pas encore au courant des ficelles du métier,
soldat novice qui n'a participé à aucune guerre.
Premier
texte (sens dénotés) : En plein ÉTÉ, le COURANT de la rivière
est très faible à cause du manque d'eau. L'activité de canoë-kayak
doit être annulée. Ça évite pas mal de BLEUS aux débutants. À
la place, on organise un CANON à trois voix, enfantines, masculines
et féminines. Les représentations ont lieu le soir, lorsque le BLEU
du ciel se fonce jusqu'à noircir l'horizon, jusqu'à s'illuminer de
milliers de paillettes dorées, comme ton regard lorsque tu
m'aperçois.
Deuxième
texte (connotations) : Les COURANTS de la lande et les ornières
immenses du reflux filent circulairement vers l'est. Là où le bruit
du CANON ne résonne plus que très faiblement, là où le BLEU du
ciel pâlit puis rosit dans un éclatant carnage. C'est l'ÉTÉ de
tous les dangers, celui où je te rencontrerai...
La
première phrase est extraite de : Illuminations (1886), de
Arthur Rimbaud [poète français, 1854-1891, dont la brève
œuvre est l'une des sources majeures de la mutation poétique
moderne, influençant le surréalisme après le symbolisme].
À vous de jouer,
À vos claviers, plumes
et stylos !
Bibliographie
:
>
BERTAUD DU CHAZAUD Henri, 1999. Dictionnaire
de synonymes et contraires.
Paris, Le Robert (Collection Les usuels).
>
BOURDEREAU Frédéric, FOZZA Jean-Claude, [et al.], 1996. Précis
de français : langue et littérature.
Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), pp.
28-29.
>
DUBOIS Jean, GIACOMO Mathée, [et al.], 1999. Dictionnaire
de linguistique et des sciences du langage.
Paris, Larousse, pp.
111, 135, 309, 369.
> Le
Grand Robert de la langue française,
2001, 2e éd.
6 vol.
>
GREVISSE Maurice, 1993. Le
bon usage : grammaire française.
Paris, Duculot. 13e éd.,
pp.
8, 260.
>
NIOBEY Georges (dir.), 1997. Dictionnaire
analogique,
Paris, Larousse (Références Larousse).
> Le
Petit Robert des noms propres,
2007.
>
PEYROUTET Claude, 1994. Style
et rhétorique.
Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), pp.
12-15.
> REY
Alain (dir.), 1994. Dictionnaire
historique de la langue française.
Paris, Le Robert. 2 vol., pp.
476, 577.
Contact
: numencegalerielitteraire@gmail.com
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