lundi 17 juin 2013

Le surréalisme, la libre-association, l'écriture automatique : atelier d'écriture n° 29 de LA PUBLiance


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L a P U B L i a n c e

atelier d'écriture et publication

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Atelier d'écriture n° 29



Le surréalisme, la libre-association,

l'écriture automatique



Tu te lèves l'eau se déplie

Tu te couches l'eau s'épanouit



Tu es l'eau détournée de ses abîmes

Tu es la terre qui prend racine

Et sur laquelle tout s'établit

...



On appelle surréalisme l'ensemble des procédés de création et d'expression utilisant toutes les forces psychiques (automatisme, rêve, inconscient, etc.) libérées du contrôle de la raison et en lutte contre les valeurs reçues. C'est un mouvement intellectuel révolutionnaire affirmant la supériorité de ces procédés, qui se développa surtout en littérature et dans les arts plastiques, la peinture, le cinéma...



C'est de très mauvaise foi qu'on nous contesterait le droit d'employer le mot surréalisme dans le sens très particulier où nous l'entendons car il est clair qu'avant nous ce mot n'avait pas fait fortune. Je le définis donc une fois pour toutes :

Surréalisme : automatisme psychique pur par lequel on se propose d'exprimer (…) le fonctionnement réel de la pensée. Dictée de la pensée, en l'absence de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale.

D'un point de vue philosophique, le surréalisme repose sur la croyance à la réalité supérieure de certaines formes d'associations négligées jusqu'à lui, à la toute-puissance du rêve, au jeu désintéressé de la pensée.

Extrait de : Manifeste du surréalisme (p. 41-42, 1924), d'André Breton [écrivain français, 1896-1966 ; fonde avec Louis Aragon, Philippe Soupault et Paul Éluard en 1923 le mouvement surréaliste ; loin de s'affirmer par une rupture radicale, le surréalisme tel qu'André Breton en a défini et illustré les ambitions, peut être considéré comme l'aboutissement du romantisme autant que du symbolisme].



...

Tu fais des bulles de silence dans le désert des bruits

Tu chantes des hymnes nocturnes sur les cordes e l'arc-en-ciel

Tu es partout tu abolis toutes les routes

...



La création du mon masculin et adjectif surréaliste est attribuée à Guillaume Apollinaire (1917, Les Mamelles de Tirésias, drame surréaliste) ; le mot lui aurait été suggéré par Pierre Albert-Birot [écrivain français, 1876-1967, dont la création la plus étonnante fut le personnage de Grabinoulor] : employé primitivement au sens de surnaturaliste (adepte du surnaturalisme, acceptation du surnaturel), il a pris peu après (1920) une valeur particulière en relation avec un mouvement intellectuel, artistique et littéraire issu de Dada [mouvement artistique et littéraire, nihiliste et fondamentalement subversif créé en 1916 à Zurich par Tristan Tzara entre autres] et qui sera défini sous le terme de surréalisme par André Breton autour de valeurs psychanalytiques et révolutionnaires.

À sa suite, Guillaume Apollinaire créa ou diffusa le premier le nom masculin surréalisme (1917) qui lui serait venu de Marc Chagall [peintre, graveur et sculpteur français d'origine russe, 1887-1985] ou de Pierre Albert-Birot. Le mot, défini et illustré par André Breton dans le Premier manifeste du surréalisme (1924) comme un « automatisme psychique [exprimant] le mouvement réel de la pensée », resta lié plus que le mot surréaliste à la référence artistique et littéraire.

La surréalité (mot créé en 1919 d'après surréalisme) désigne chez les surréalistes la réalité absolue, considérée comme synthèse de la réalité courante (appauvrie par la raison) et de l'inconscient, du rêve. Elle désigne, dans un usage littéraire, ce qui va au-delà de la réalité courante.



Le nom féminin réalité, d'abord reellité (vers 1290), puis realté (XIVe siècle) et réalité (vers 1550), est emprunté, à la suite de réel, au latin médiéval realitas, -atis, dérivé de realis (qui donna réel). Realitas correspond à bien, propriété (1120) et, dans l'usage scolastique (au moyen âge, la scolastique rassemblait la philosophie et la théologie qui étaient enseignées par l'université) désigne le caractère réel de quelque chose, de quelqu'un (vers 1300, John Duns Scot, théologien et philosophe écossais, 1266-1308).

Dans l'usage courant, la réalité correspond à vie réelle, par opposition au rêve, au désir, à la fiction (vers 1700). La psychanalyse freudienne a élaboré un concept qui lui est propre avec principe de réalité (1923), contemporain de principe de plaisir, épreuve de la réalité (1922).



...

Tu sacrifies le temps

À l'éternelle jeunesse de la flamme exacte

Qui voile la nature en la reproduisant

...



Le surréalisme ne remet pas seulement en cause le sujet de l'art ou ses buts. Ce sont les notions mêmes d'artiste ou d’œuvre qui se trouvent ébranlées. Les surréalistes s'écartent de l'idée d'un créateur individuel et identifiable. Il ne s'agit plus d'écrire un texte ni de peindre un tableau selon des méthodes bien définies.

Doit apparaître une chose toujours étrange et nouvelle, destinée à une surréalité, c'est-à-dire à un monde que la raison ne saurait pénétrer. L'analogie, les associations d'idées, la libre-association, l'onirisme et les connotations (une connotation est un sens particulier que prend un mot ou un énoncé en fonction du contexte situationnel) peuvent, seules, y opérer souverainement.



...

Femme tu mets au monde un corps toujours pareil



Le tien



Tu es la ressemblance



Facile, de Paul Éluard [Eugène Grindel dit, poète français, 1895-1952 ; participe aux activités du mouvement Dada ; fonde avec Louis Aragon, Philippe Soupault et André Breton en 1923 le mouvement surréaliste].



L'image surréaliste.

Au premier abord, l'image surréaliste semble inclassable. Il est très difficile et souvent impossible de la réduire à un trope (un trope est une figure sémantique portant sur un mot et le faisant changer de sens dans l'histoire, un écart de style de substitution, par exemple : Il a relavé la bête et prêté l'oseille, pour : Il a relevé la tête et prêté l'oreille) ou à une métaphore ou une métonymie. En effet, elle est dépourvue de référent réel : elle ne renvoie pas à un objet, un être, ou une situation reconnaissables. Exemple :

Parfums éclos d'une couvée d'aurores

Qui gît toujours sur la paille des astres

Extrait de : Capitale de la douleur, de Paul Éluard, où couvée d'aurores peut certes être réductible à une métaphore, mais à une image sans référent plausible : Qui gît toujours sur la paille des astres.

Le degré d'arbitraire de l'image surréaliste doit toujours être le plus élevé, sans être total. De plus, la syntaxe est respectée. La réalité de l'image surréaliste doit être seulement psychique, loin de toute isotopie (secteur de la réalité).

L'image surréaliste est une image à prendre à la lettre, car selon des Surréalistes, tenter de la réduire à un trope est dérisoire. Mieux vaut écouter en elle les pulsions inconscientes de l'auteur, ses désirs symboliquement révélés. L'image surréaliste « cogne à la vitre ». Exemple :

La campagne mangeait la couleur de ta jupe odorante

Avidité et contrainte s'étaient réconciliées

Le château de Maubec s'enfonçait dans l'argile

Extrait de : Évadné, de : Fureur et mystère, de René Char [poète français, 1907-1988]. Au lieu de chercher des métaphores, il faut admettre l'appétit de la campagne (La campagne mangeait), la présence de la jupe et de l'avidité, symboles du désir, la beauté visuelle du château qui sombre (Le château de Maubec s'enfonçait dans l'argile).



Consigne :



En partant des mots suivants, écrire quelques lignes en écriture automatique, c'est-à-dire rapidement, au fil de la plume, sans appliquer les règles syntaxiques et grammaticales, mais plutôt en laissant le champ libre à l'imagination et à l'inspiration. Puis rétablir la syntaxe et la grammaire, et agencer les images en un petit poème en vers libres ou en un petit récit. Les mots proposés sont :

Rivière, herbes, firmament, soleil, écume, noyer, figer, couper, battre, rude, barré, argenté, tourbillonné.



Cela pourrait donner ceci :



Herbes tourbillonnantes et noyées

Herbes figées qu'un elfe coupe et bat

Au firmament des profondeurs ensoleillées

Soleil noyé

Rudesse argentée

Soleil au firmament, ou au firpapa ?



Au firmament, ou au firpapa ? Pourquoi pas ?

Au firmament des profondeurs ensoleillées



Je regarde le soleil noyé au fond de la rivière

Les yeux dans les yeux



Choyé d'herbes tourbillonnantes et noyées

Elles aussi



Herbes figées qu'un elfe coupe et bat

Figées par la rudesse argentée des galets



Lapidation lithique par le minéral

Ou plus simplement rigidité lithique

Souplesse calcifiée des algues



À vous de jouer,

À vos claviers, plumes et stylos !



Bibliographie :



> BOURDEREAU Frédéric, FOZZA Jean-Claude, [et al.], 1996. Précis de français : langue et littérature. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), p. 114.



> Le Grand Robert de la langue française, 2001, 2e éd. 6 vol., t. 6, p. 892.



> Le Petit Robert des noms propres, 2007.



> PEYROUTET Claude, 1994. Style et rhétorique. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan), p. 80.



> REY Alain (dir.), 1994. Dictionnaire historique de la langue française. Paris, Le Robert. 2 vol., p. 1740.



> THERON Michel, [199-?]. 99 réponses sur les procédés de style. Montpellier, Réseau CRDP/CDDP (Centre Régional de Documentation Pédagogique/Centre Départemental de Documentation Pédagogique du Languedoc-Roussillon) du L.-R. Fiche 44.



Contact : numencegalerielitteraire@gmail.com



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