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L
a P U B L i
a n c e
atelier
d'écriture et publication
.
. . . . . .
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e n l i g n e . . .
. . . . . .
Atelier d'écriture
II
La
très longue phrase avec
L'Acacia
(1989) de Claude
Simon
Sommaire
>
Extrait de L'Acacia
(1989) de Claude Simon, pp. 82-83.
>
Qui était Claude Simon ?
>
Que raconte L'Acacia
?
>
Que sont la périphrase, la phrase simple, la phrase complexe, la
phrase organisée, la phrase progressive, et la phrase discontinue ?
>
Extrait de L'Acacia
(1989) de Claude Simon (pp. 82-83), où les articulations sont en
majuscule.
>
Exercices et consignes d'écriture.
***
>
Extrait de L'Acacia
(1989) de Claude Simon, pp. 82-83.
[...]
(tandis qu'elles continuaient à dormir dans leurs chambres aux
plâtres rongés), avec au centre une table d'acajou, des fauteuils
aux accoudoirs d'ébène, un piano dont aucune ne savait jouer et une
vitrine à dessus de marbre, comme pour accueillir au fur et à
mesure qu'elles les retiraient des caisses déclouées les coraux et
les coquillages géants, les peaux de tigres, les sagaies achetées
au hasard des marchés indigènes ou des escales, échoués là, dans
la pénombre distillée par les rideaux de peluche et où luisaient
sur les flancs de charbonneux cache-pots de bronze aux reliefs
frottés d'or les pennes de hérons se poursuivant parmi les méandres
de rivières et de collines semblables à des dragons, comme si d'un
peu partout, arraché de place en place à la surface de ces
continents qu'elles parcouraient par procuration (suivant sur la
carte la marche des paquebots dont les panaches de fumée s'étiraient
et se dissolvaient sur les océans de papier bleu pâle, doublant les
caps, franchissant les détroits entre les îles, des terres
coloriées de safran ou d'amande), parvenait aux deux femmes sous
forme de flèches, de lances, de porcelaines, d'émaux, de paravents
brodés d'oiseaux-paradis, de soyeux chrysanthèmes, et d'une
succession de suaves visages féminins, l'hétéroclite butin arraché
à des mondes barbares en même temps que peu à peu, photographie
après photographie, elles pouvaient voir l'ancien gamin achever sa
métamorphose, comme barbare lui-même à présent, avec ses yeux de
plus en plus clairs dans son visage brûlé par le soleil, sa barbe
sauvage, ses moustaches de brigand ou de corsaire, comme ces
conquérants peu à peu assimilés par leurs conquêtes, de plus en
plus tanné, la barbe de plus en plus hérissée, jusqu'au jour où
non pas d'un de ces lointains pays aux noms exotiques, à
l'exubérante végétation ou aux sables calcinés mais de la
garnison du Midi où il servait entre deux voyages elles reçurent la
lettre par laquelle il leur annonçait qu'il avait décidé de se
marier.
>
Qui était Claude Simon ?
Écrivain
français (1913-2005), prix Nobel de littérature en 1985, Claude
Simon est l'auteur d'une œuvre où l'écrivain « hanté
par deux choses : la discontinuité, l'aspect fragmentaire des
émotions qui ne sont jamais reliées les unes aux autres, et en même
temps leur continuité », tente de saisir une réalité
dont « le propre (...) est de nous paraître irréelle,
incohérente », d'où l'effort pour substituer au temps
classique « une durée vague, hachurée » où le
passé et le présent coïncident.
La
phrase participe à cette recherche de substituer au temps classique
« une durée vague, hachurée » où le passé et
le présent coïncident : phrase longue, coupée de parenthèses qui
introduisent des descriptions minutieuses ou des analyses
psychologiques « fragmentaires » rendues
difficiles car « Je est d'autres », la phrase
parvient à suggérer les rapports complexes de la conscience et de
la réalité.
Auteur
de Le Vent (1957),
L'Herbe (1958), Le
Palace (1962), Histoire
(1967), Les Géorgiques
(1981), etc., Claude Simon est aussi l'auteur de La Route
des Flandres (1960), un des chefs-d’œuvre du Nouveau roman.
Le
Nouveau roman n'a jamais été une école ni un groupe littéraire,
et les seuls points communs à tous les écrivains publiés dans les
années cinquante (Michel Butor, Claude Ollier, Nathalie Sarraute,
Claude Simon, entre autres) par Jérôme Lindon (directeur des
éditions de Minuit) sont de l'ordre du refus.
Le
Nouveau roman est un roman
contemporain qui s'oppose au roman traditionnel notamment
par le refus de la psychologie (qui offrait une rassurante
illusion d'identité) et le refus de la linéarité du discours
(qui garantissait la cohérence du récit). Les « nouveaux
romanciers » proposèrent une nouvelle forme de
réalisme, celui qui suggère le déroulement de la conscience
avec ses opacités, ses ruptures temporelles et son apparente
incohérence.
>
Que raconte L’Acacia
?
L’Acacia
(1989) est une autobiographie paradoxale dont le « je »
est banni, une tentative pour retourner aux sources de la mémoire
familiale.
Dans
les cimetières militaires de 1919, trois femmes en voiles de deuil,
accompagnées d'un jeune garçon, cherchent la tombe d'un soldat
tombé au combat. En 1940, revenu de la déroute, un jeune homme
tente de reprendre pied dans la vie quotidienne, et, contemplant
l'acacia dont les branches tremblent devant sa fenêtre, se met à
écrire.
Entre
ces deux « séquences » (la première et la dernière du
livre), Claude Simon donne à lire – donne à voir plutôt, en
douze tableaux (17 mai 1940, 27 août 1914, 1880-1914, 27 août
1939, 1982-1914, 1939-1940, 1914, 1940, 1910-1914-1940) – la
naissance d'une vocation littéraire.
Il
écrit parallèlement une sorte d'autobiographie familiale et se fait
l'archéologue du passé de ses parents. Son roman se présente, en
effet, comme un arbre généalogique aboutissant, à travers des
générations de paysans pauvres du Jura ou de gens de petite
noblesse du Sud-Ouest, à un jeune peintre dilettante qui, mûri par
l'épreuve de la guerre, va tenter l'aventure de l'écriture.
>
Que sont la périphrase, la phrase simple, la phrase complexe, la
phrase organisée, la phrase progressive, et la phrase discontinue ?
La
notion de périphrase a déjà été abordée lors de l'atelier n°42
(mardi 9 octobre 2012).
Qu'est-ce
qu'une périphrase ?
La
périphrase est « une figure de rhétorique qui consiste
à exprimer une notion unique par un groupe de plusieurs mots, à
l'aide de circonlocutions autour de la chose exprimée, de détours ».
Au sens propre, la périphrase est une désignation de nature
descriptive, la périphrase insiste sur la caractérisation, les
qualités des objets ou des êtres.
Attention
à ne pas la confondre avec la paraphrase, qui est le
« développement explicatif d'un texte. Paraphraser c'est
commenter, expliquer, amplifier, éclaircir, imiter ».
La
Phrase :
Le
nom féminin phrase
est emprunté (1546) au latin phrasis
(diction, style,
élocution), lui-même
emprunt au grec phrasis,
phraseôs
(discours, expression,
langage, diction). C'est
un dérivé du verbe phrazein
dont le sens primitif est faire
comprendre, indiquer par des signes ou par la parole,
d'où expliquer ce que
l'on veut dire et, après
Homère [poète né en
Ionie, au IXe
siècle avant J.‑C.],
parler pour se faire
comprendre, dire, annoncer.
Le mot est d'origine inconnue.
Phrase
a été introduit en français avec les valeurs d'arrangement
de mots, façon de parler, tour donné à l'expression,
seuls sens connus aux XVIe
et XVIIe
siècles. Cet emploi est sorti d'usage, sauf dans quelques
expressions comme « faire
des phrases »
(1729) parler, écrire
avec affectation, (1829)
pérorer verbeusement
pour dire peu de chose,
ou « phrase toute
faite » (1688), ou
encore « sans
phrases » (1874)
sans détours.
C'est
au XVIIIe
siècle, mais encore de façon équivoque et contradictoire que s'est
dégagé le sens moderne de proposition
simple ou réunion de propositions formant une unité d'expression et
séparées dans l'écriture par des points
(1737).
Pourquoi
et comment faire de longues phrases ?
« Une
phrase est un fil, que le point coupe. On aime parfois dérouler le
fil, prolonger le suspens, laisser monter la tension, goûter le
plaisir de l'attente, la fascination du crescendo, tandis que la
phrase peu à peu, telle une montgolfière, se gonfle et s'arrondit
jusqu'à l'envol. En fait, si la phrase est longue, c'est avant tout
à cause de la réalité, si multiple et changeante, que l'on
s'évertue à embrasser d'une seule étreinte. »
La
phrase longue sert aussi à reproduire l'errance compliquée d'un
personnage ou un espace labyrinthique.
Selon
Claude Simon, elle peut et doit tout décrire :
« ...
de sorte que plus tard, quand il essaya de raconter ces choses, il se
rendit compte qu'il avait fabriqué au lieu de l'informe, de
l'invertébré, une relation d'événements telle qu'un esprit normal
(...) pourrait la constituer après coup, à froid, (...) tandis qu'à
la vérité cela n'avait ni formes définies, ni noms, ni adjectifs,
ni sujets, ni compléments, ni ponctuation (en tout cas pas de
points), ni exacte temporalité, ni sens, ni consistance sinon celle,
visqueuse, trouble, molle, indécise de ce qui lui parvenait... ».
Remarquer
les nombreuses virgules (17 au total) qui articulent la compréhension
du sens, les mots-articulations (« de
sorte que », « tandis
que ») qui permettent à la phrase de
rebondir, et l'usage de la répétition (« ni »
employé 9 fois) et de l'énumération (4 adjectifs : visqueuse,
trouble, molle, indécise) qui caractérisent l'objet,
c'est-à-dire la perception incohérente de la réalité par le
narrateur.
Les
mots-articulation (conjonctions, locutions et prépositions)
servant à lier les propositions subordonnées qui composent une très
longue phrase, sont les suivantes :
->
conjonctions qui marquent l'opposition :
cependant, mais, néanmoins, or, pourtant, toutefois,
l'alternative ou la négation : ni,
ou, soit, tantôt, la conséquence : aussi,
donc, partant, sinon, sorte, de sorte que, en sorte que, conjonctions
qui marquent la conclusion : ainsi,
enfin, l'union : et ;
->
locutions : au surplus, du reste,
d'ailleurs, c'est pourquoi, par conséquent ;
->
conjonctions de subordination :
comme (marque de comparaison),
lorsque, quand (marques du temps),
puisque, car (marques de cause),
si (marque de condition),
que (marque de conséquence),
quoique (marque de concession),
etc.
->
prépositions : après, avant,
avec, chez, contre, dans, de, depuis, derrière, dès, devant, en,
entre, envers, hors, jusque, malgré, outre, par, parmi, passé,
pour, sans, sauf, selon, sous, sur, vers, pendant, suivant,
etc.
La
phrase simple, la phrase composée, la phrase complexe :
Les
phrases
offrent de multiples possibilités d'expression. On peut trouver des
assemblages originaux et réaliser des expansions de termes : le
style naît de ces potentialités. La
phrase simple
obéit théoriquement à la structure suivante : groupe sujet +
groupe verbal + (ou -) groupe complément, ou attribut ou adverbe. Le
verbe est l'élément moteur, sujet et complément s'y accrochent,
par exemple : « Le
garçon s'était endormi sur la plage ».
Elle
peut être réduite à un simple sujet + verbe : « Le
garçon s'était endormi »,
voire à un verbe seul : « Dort
! ».
Des
inversions de mots sont possibles : « Sur
la plage, le garçon s'était endormi ».
La
phrase simple peut être étendue par expansion et enrichie de 3
manières : par addition (« Le
garçon, fatigué et détendu, s'était endormi sur la plage »),
par emboîtement (« Le
garçon de la villa aux volets bleus s'était endormi sur la
plage »),
et par dédoublement (« Le
garçon, d'autres enfants plus jeunes, et même le petit chien
allongé à l'ombre d'un parasol, s'étaient endormi sur la plage »).
Expansions, réductions et inversions créent des potentialités
stylistiques.
La
phrase composée
est un assemblage de phrases simples, juxtaposées ou coordonnées,
qui deviennent des propositions. Par exemple : « Il
déploie un ample mouchoir
(1ère
phrase simple) et
se mouche avec grand bruit
(2ème
phrase simple coordonnée par la conjonction de coordination « et »)
; il
crache fort loin
(3ème
phrase simple), et
il éternue fort haut
(4ème
phrase simple). » Jean de La Bruyère (1645-1696), « Les
Caractères ».
Chaque
proposition peut être enrichie par addition, emboîtement ou
dédoublement, tout comme une phrase simple.
La
variété des phrases simples et des phrases composées, leur
alternance dans un texte ainsi que leurs expansions constituent des
virtualités stylistiques.
Par
exemple cet extrait des « Essais »
de Montaigne (1533-1592) :
« J'ai
la complexion du corps libre, et le goût commun autant qu'homme du
monde. La diversité des façons d'une nation à une autre ne me
touche que par le plaisir de la variété. Chaque usage a sa raison.
Soient des assiettes d'étain, de bois, de terre ; bouilli ou rôti ;
beurre ou huile de noix ou d'olive ; chaud ou froid, tout m'est un. »
est une succession de :
phrase
composée dont l'effet est la symétrie (phrase 1 « J'ai
la complexion... du monde. »),
phrase
simple dont l'effet est de donner des informations claires (phrase 2
: « La
diversité... variété. »),
phrase
simple qui, par sa brièveté, ressemble à une maxime (phrase 3 :
« Chaque
usage a sa raison. »),
phrase
composée avec 2 propositions : la première est enrichie par
expansion (addition et dédoublement), « Soient
des assiettes... froid » ; la deuxième
est courte et conclusive : « tout
m'est un ». Cette phrase composée exprime
la variété des goûts de l'auteur et la concrétisation de ces
goûts.
La
phrase complexe est faite d'un assemblage de phrases simples,
comme la phrase composée, avec cette différence qu'elle accepte une
ou plusieurs propositions principales et une ou plusieurs
propositions subordonnées, et qu'elle demande une attention plus
soutenue, ou un abandon au rythme, à la musicalité, à la
modulation des sentiments. C'est le cas de la période.
La
phrase organisée et la phrase progressive :
La
phrase organisée revêt, ou non, un certain degré
d'intellectualisation de l'émotion ou de l'affectivité. Divers
types de phrases résultent de la logique et de l'articulation de la
pensée, et de l'expression d'une ou de plusieurs émotions. Une
phrase organisée peut être progressive, peut se trouver
relier à d'autres phrases par une notion, peut devoir son
organisation à l'ordre de ses mots, ou à l'association de
masses croissantes de mots :
La
phrase progressive met en valeur par une place privilégiée
le terme considéré comme le plus important ; la progression du
connu à l'inconnu, où le déterminant suit le déterminé, donne à
la phrase une assise logique, une allure directe et une netteté
certaine. Par exemple : Notre
langue un peu sèche et sans inversions, peut-elle subjuguer les
autres nations ? (Voltaire).
La
liaison des phrases entre elles, peut se faire au moyen non
d'un outil grammatical, mais au moyen d'une notion. Par exemple : Il
a plu hier, il fait beau aujourd'hui, où la progression
logique et claire des deux énoncés Il
a plu hier et il fait beau
aujourd'hui affaiblit (voire annule) aussi bien l'opposition
des deux journées (hier/aujourd'hui)
que l'opposition des deux états météorologiques (pluie/beau
temps). Que l'on écrive au contraire : Il
a plu hier, aujourd'hui il fait beau, ou bien : Hier
il a plu, il fait beau aujourd'hui, et l'on rétablit une
liaison indispensable à la vigueur de l'opposition. La liaison se
fait grâce à la contiguïté d'une seule notion, ou bien la notion
de temps (hier/aujourd'hui),
ou bien la notion de climat (pluie/beau
temps). Un souci de liaison des idées peut donc modifier
l'ordre des mots.
Il
a plu hier, il fait beau aujourd'hui
(effet de platitude)
ou,
Il
a plu hier, aujourd'hui il fait beau
(effet de relief)
ou
bien,
Hier
il a plu, il fait beau aujourd'hui
(effet de relief)
ou
encore,
Il
a plu hier, comme il fait beau aujourd'hui !
(effet emphatique)
>
En effet, c'est essentiellement l'ordre des mots qui donne son
mouvement à la phrase.
La
phrase discontinue :
La
phrase désorganisée ou discontinue est obtenue
volontairement par altération de son caractère rationnel et de son
ordre logique. Par exemple, dans cet extrait de : Le Renégat, ou
Un esprit confus, in L'Exil
et le Royaume : recueil de nouvelles
(1957), d'Albert Camus [écrivain
français, 1913-1960, prix Nobel de littérature en 1957]
:
Il
a bougé, non, le bruit vient d'ailleurs, et de l'autre côté,
là-bas, ce sont eux, les voilà qui accourent comme un vol d'oiseaux
sombres, mes maîtres, qui foncent sur moi, me saisissent, ah ! ah !
oui, frappez, ils craignent leur ville éventrée et hurlante, ils
craignent les soldats vengeurs que j'ai appelés, c'est ce qu'il
fallait, sur la cité sacrée...
où
la clarté de l'exposé est troublé par des exclamations, par une
apposition (mes maîtres)
éloignée du terme auquel elle se rapporte (eux),
par un changement formel du destinataire (au milieu d'un récit
rapporté au lecteur, l'impératif frappez
introduit une amorce de dialogue avec des personnages), par une
ponctuation qui, juxtaposant des actions diverses, n'organise pas les
événements mais les livre en vrac, avec un rythme haché destiné à
évoquer un débit haletant. Tout ceci traduit le désordre des
pensées et des sentiments du narrateur.
La
syntaxe, cependant, est encore maintenue, ce qui n'est pas toujours
le cas. Exemple avec cet extrait de Samuel
Beckett [romancier
et dramaturge irlandais, 1906-1989, prix Nobel de littérature en
1969, il composa une œuvre influencée par celles de Franz Kafka et
de James Joyce, dont il fut le traducteur et l'ami] :
en
moi qui furent dehors quand ça cesse de haleter bribes d'une voix
ancienne en moi pas la mienne
>
Extrait de L'Acacia
(1989) de Claude Simon (pp. 82-83), où les articulations sont en
majuscule.
[...]
(TANDIS QU'elles continuaient à dormir dans leurs chambres aux
plâtres rongés), AVEC au centre une table d'acajou, des fauteuils
aux accoudoirs d'ébène, un piano DONT aucune ne savait jouer et une
vitrine à dessus de marbre, COMME POUR accueillir au fur et à
mesure QU'elles les retiraient des caisses déclouées les coraux et
les coquillages géants, les peaux de tigres, les sagaies achetées
au hasard des marchés indigènes ou des escales, échoués là, DANS
la pénombre distillée par les rideaux de peluche ET OÙ luisaient
sur les flancs de charbonneux cache-pots de bronze aux reliefs
frottés d'or les pennes de hérons se poursuivant PARMI les méandres
de rivières et de collines semblables à des dragons, COMME SI d'un
peu partout, arraché de place en place à la surface de ces
continents QU'elles parcouraient par procuration (SUIVANT sur la
carte la marche des paquebots DONT les panaches de fumée s'étiraient
et se dissolvaient sur les océans de papier bleu pâle, doublant les
caps, franchissant les détroits entre les îles, des terres
coloriées de safran ou d'amande), parvenait aux deux femmes sous
forme de flèches, de lances, de porcelaines, d'émaux, de paravents
brodés d'oiseaux-paradis, de soyeux chrysanthèmes, ET d'une
succession de suaves visages féminins, l'hétéroclite butin arraché
à des mondes barbares EN MÊME TEMPS QUE PEU À PEU, photographie
après photographie, elles pouvaient voir l'ancien gamin achever sa
métamorphose, COMME barbare lui-même à présent, AVEC ses yeux de
plus en plus clairs DANS son visage brûlé par le soleil, sa barbe
sauvage, ses moustaches de brigand ou de corsaire, COMME ces
conquérants peu à peu assimilés par leurs conquêtes, de plus en
plus tanné, la barbe de plus en plus hérissée, JUSQU'AU JOUR OÙ
non pas d'un de ces lointains pays aux noms exotiques, à
l'exubérante végétation OU aux sables calcinés MAIS de la
garnison du Midi OÙ il servait entre deux voyages elles reçurent la
lettre PAR LAQUELLE il leur annonçait QU'il avait décidé de se
marier.
>
Exercices et consignes d'écriture.
1.
Relever tous les verbes de l'extrait de texte de L'Acacia cité
plus haut.
Continuer,
dormir, ronger, savoir, jouer, accueillir, retirer, déclouer,
acheter, échouer, distiller, luire, etc.
2.
Puis relever les mots (conjonctions, locutions, prépositions) ainsi
que les signes de ponctuation qui articulent les différentes
propositions de cette très longue phrase.
Les
parenthèses, « tandis que », la virgule, « avec »,
« dont », « comme pour », « que »,
« dans », « et où », « comme si »,
« suivant », etc.
3.
Enfin, composer votre propre très longue phrase, en utilisant les
verbes et les mots-articulation relevés précédemment.
Avec
les verbes et les articulations des 5 premières lignes de l'extrait
de L'Acacia cité plus haut, cela pourrait donner ceci :
Verbes
: continuer, dormir, ronger,
savoir, jouer, accueillir, retirer, déclouer, acheter.
Articulations
: les parenthèses, « tandis
que », la virgule, « avec », « dont »,
« comme pour », « que ».
Très
longue phrase :
Ça
continue (ça n'est pas moi, ni un autre, ni une autre, cuisson :
trois minutes par pancake) tandis que tout le monde dort dans la
pénombre d'une une nuit infinie, océan d'une marine nuit, nuit
polaire décennale – 250 g de farine, une demie cuillère à café
de sel, 50 g de sucre en poudre, trois œufs, un demi sachet de
levure chimique, 50 cl de lait, 100 g de beurre, délicatement et
patiemment rongée par des étoiles inaccessibles, blanches et
froides (certaines étoiles ne sont ni si blanches ni si froides que
ça) avec ça on sait quand ça commence mais jamais quand ça finit
(ici ou ailleurs) on joue à savoir qu'on est soi ou un autre ou une
autre ou je ne sais pas qui... (un peu d'huile pour la poêle à
blinis), dont on accueille, soulagé, la remontée vers la surface,
la surface des choses, les choses ordinaires et banales, l'ordinaire
balisé, la remontée d'une longue apnée de soi qui retire toujours
du goût aux choses, de l'appétit au ventre, de l'élan aux jambes
et au cœur, comme pour déclouer la possibilité de cette remontée,
la possibilité d'un recommencement, tout petit recommencement, et ça
continue encore et encore, que je respire, que ça respire, que l'on
respire, sirop d'érable un peu de crème amandes émondées... qu'il
respire, qu'elle respire ou pas, et ça continue à acheter le temps,
encore un tout petit peu de temps, à acheter un tout petit instant,
pour que ça continue (moi je mets du miel sur les pancakes).
Et maintenant...
À vous de jouer - et
d'écrire,
À vos claviers, plumes
et stylos !
Bibliographie
:
->
Remarque : la bibliographie qui suit donne les références
des ouvrages consultés pour rédiger le contenu des ateliers
hebdomadaires et mensuels.
Pour
connaître plus précisément le numéro
de la page qui traite de la notion recherchée, consulter la
bibliographie qui se trouve à la fin de chaque atelier hebdomadaire.
Par exemple, pour la périphrase,
voir la bibliographie à la fin de l'Atelier n°42, publié le mardi
9 octobre 2012.
>
BOURDEREAU, Frédéric, FOZZA, Jean-Claude, [et al.], 1996. Précis
de français : langue et littérature.
Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan).
>
CRESSOT Marcel, JAMES Laurence (mise à jour), 1991. Le style et
ses techniques : précis d'analyse stylistique. Paris, Presses
universitaires de France. 13e éd.
>
DUBOIS Jean, GIACOMO Mathée [et al.], 1999. Dictionnaire de
linguistique et des sciences du langage. Paris, Larousse.
>
Encyclopædia
Universalis 2009, édition numérique.
>
Le Grand Robert de la langue française,
2001, 2e éd.
6 vol.
>
GREVISSE, Maurice, 1993. Le bon usage : grammaire française.
Paris, Duculot, 13e éd.
>
LITTRÉ, Paul-Émile, 1991 (1866-1877). Dictionnaire
de la langue française.
Chicago, Encyclopaedia Britannica Inc. Nouv. éd. 6 vol. + 1
supplément.
> Le
Petit Robert des noms propres,
2007.
>
PEYROUTET, Claude, 1994. Style
et rhétorique.
Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan).
> REY,
Alain (dir.), 1994. Dictionnaire
historique de la langue française.
Paris, Le Robert. 2 vol.
>
SIMON, Claude. L'Acacia.
Paris : Les Éditions de Minuit, 1989. 379 p.
>
THERON, Michel, [199-?]. 99
réponses sur les procédés de style.
Montpellier, Réseau CRDP/CDDP (Centre Régional de Documentation
Pédagogique/Centre Départemental de Documentation Pédagogique du
Languedoc-Roussillon) du L.-R.
>
VOLKOVITCH, Michel. Verbier : herbier verbal. M. Nadeau, 2000.
Contact
: numencegalerielitteraire@gmail.com
L
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atelier
d'écriture et publication
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