vendredi 25 octobre 2013

Atelier d'écriture III, avec Au château d'Argol de Julien Gracq


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L a P U B L i a n c e

atelier d'écriture et publication

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Atelier d'écriture III



Les inversions de mots ou de groupes

de mots avec Au château d'Argol

(1938) de Julien Gracq



Sommaire



> Extrait de Au château d'Argol (1938) de Julien Gracq, pp. 82-83, 110 et 182.

> Qui était Julien Gracq ?

> Au château d'Argol ou la genèse d'une écriture.

> Qu'est-ce qu'une inversion de mots ou de groupes de mots ?

> Extrait de Au château d'Argol (1938) de Julien Gracq (pp. 82-83, 110 et 182), où les inversions de mots sont en majuscule.

> Exercices et consignes d'écriture.



***



> Extrait de Au château d'Argol (1938) de Julien Gracq, pp. 82-83, 110 et 182.



Au milieu même de la longue nuit de décembre, par les escaliers déserts, par les salles désertes, aux flambeaux éteints, aux flambeaux renversés, il quitta le château sous l'habit du voyageur. Très vite ses pas le conduisirent (car il se hâtait dans la nuit froide) vers l'allée magique qu'Albert et Heide avaient suivie en un jour fatal. Les pans flottants de son manteau l'environnaient comme des ailes noires.

[…] Alors, du fond de son inquiétude un son s'éleva, qui parut emplir en un instant la chapelle et ruisseler le long des murs luisants d'eau, et Albert, sans oser se retourner, tellement cet accord le confondait par son ampleur inouïe, devina alors qu'Herminien, pendant son exploration silencieuse, avait gravi les degrés de pierre d'un orgue qui s'élevait dans l'obscurité à gauche de la porte et occupait une partie considérable de la chapelle, mais de l'examen duquel avaient dû le distraire aussitôt les effets séduisants de l'éclairage.

[…] Mais lorsque le soir refaisait pour lui dans le grand salon l'unité d'un monde qui y paraissait alors tout entier contenu, une trépidante exaltation s'emparait de son esprit. Avec la ferveur d'un demi-délire, avec une espèce de volubilité étourdissante, il projetait alors ses paroles comme les mailles d'un filet dont il eût voulu, d'une étreinte désespérée, envelopper son âme, l'âme de Heide, qui lui semblait désormais séparée de lui par l'effet d'une malédiction atroce. Il eût voulu, pour la retenir, pour la garder, pour la charmer, peupler le salon et le manoir entier de ses arabesques dangereuses, de ses bouleversantes incantations, avec une prévoyance merveilleusement active jalonner d'avance de ses pensées toutes les avenues qui pouvaient s'ouvrir à l'âme de Heide – distendre son esprit jusqu'aux limites extrêmes du monde comme un tapis magique et vivant, aux fleurs géantes, hors duquel jamais son pied ne pût trouver la chance de s'égarer.

Et avec un acharnement sublime, dans le défi insensé de son cœur, chaque soir à nouveau se tissait ce filet de Pénélope au tissu arachnéen, que Heide crevait à chaque instant en se jouant et sans s'en apercevoir même, mais dont Albert sentait tomber sur lui les mille replis à la façon d'une ombre sur son cerveau.



> Qui était Julien Gracq ?



Écrivain français (1910-2007), prix Goncourt (refusé par l'auteur) en 1951 avec Le Rivage des Syrtes, Julien Gracq est le pseudonyme de Louis Poirier, qui mena, parallèlement à sa carrière d'écrivain, une carrière dans l'enseignement, en tant que professeur agrégé d'histoire et de géographie.

D'ailleurs, ses romans soulignent l'influence des milieux géographiques sur l'homme ; les longues descriptions organisées suivant une construction musicale, sont la projection du paysage intérieur des personnages.

Publié par la Librairie José Corti (Paris), Julien Gracq est l'auteur entre autre de : Liberté grande (1947, recueil de textes surréalistes), Le Roi pêcheur (1948, théâtre), Un balcon en forêt (1958, roman), La Presqu'île (1970, recueil de trois textes romanesques), En lisant, en écrivant (1980, recueil de textes critiques), Entretiens (2002), etc.



> Au château d'Argol ou la genèse d'une écriture.



Premier roman de Julien Gracq, immédiatement salué par André Breton [écrivain français (1896-1966) ; fonde avec Louis Aragon, Philippe Soupault et Paul Éluard en 1923 le mouvement surréaliste ; dont Julien Gracq fut un temps le compagnon de route sans jamais s'associer aux textes collectifs], Au château d'Argol paraît la même année (1938) que Le Théâtre et son double, essai d'Antonin Artaud [écrivain français, 1896-1948] et base de la réflexion moderne sur la mise en scène, que Les Parents terribles de Jean Cocteau [écrivain français, 1889-1963, entré à l'Académie française en 1955], ou que La Nausée, roman de Jean-Paul Sartre [philosophe, 1905-1980, écrivain et critique français] sur l'existentialisme en littérature.

Remarque : le surréalisme a été abordé lors de l'atelier d'écriture n°29,

publié le lundi 17 juin 2013.



L'emprunt aux légendes du Moyen Âge et aux contes des romantiques allemands est sensible dans ce premier livre de Julien Gracq, qui en utilise les riches symboles pour mieux susciter le sentiment de l'étrange.

« Puissent ici être mobilisées les puissantes merveilles des Mystères d'Udolphe, du château d'Otrante, et de la maison Usher pour communiquer à ces faibles syllabes un peu de la force d'envoûtement qu'ont gardée leurs chaînes, leurs fantômes, et leurs cercueils », extrait de l'Avis au lecteur, écrit par l'auteur en 1938

en préface au roman.

Tout récit gracquien est la reprise de récits antérieurs (appelée aussi intertextualité). Le travail de l'écriture se réalisant par la transformation, ou l'enfouissement, de textes antérieurs, tel l'élaboration d'un palimpseste [un palimpseste est un manuscrit dont on a effacé la première écriture pour pouvoir écrire un nouveau texte ; c'est aussi un mécanisme psychologique par lequel de nouveaux sentiments ou de nouvelles idées se substituent aux précédents et les font disparaître], pour aboutir à une écriture qui cultive le sentiment de « l'inquiétante étrangeté ».

Au château d'Argol en est le premier exemple dans l’œuvre de l'auteur, qui superpose divers textes du XIXe siècle :

=> Les Mystères d'Udolphe (1794) d'Ann Radcliffe [romancière britannique (1764-1823) qui inventa le roman noir],

=> La Chute de la maison Usher : conte fantastique (1840) d'Edgar Allan Poe [écrivain américain (1809-1849), maître du conte du raisonnement exagérément subtil (ratiocination) et d'horreur],

=> Parsifal : drame musical (1882) de Richard Wagner [compositeur allemand (1813-1883) et l'un des plus grands réformateurs de l'histoire de la musique],

=> Béatrix : roman d'éducation (1839-1845) de Honoré de Balzac [écrivain français, 1799-1850],

=> Le Château des Carpathes (1892) de Jules Verne [écrivain français (1828-1905), dont un des buts littéraires était d'éveiller par ses œuvres l'intérêt du public pour le mouvement scientifique et les travaux du monde savant du milieu du XIXe siècle],

=> le nom d'Argol provenant quant à lui du plateau d'Orgall sur lequel est bâti le château des Carpathes,

=> tandis que Otrante est une ville de l'extrême Sud italien, au sud de Bari et de Brindisi.



Résumé du roman :

C'est l'été. Albert, dernier rejeton d'une famille noble et riche, mais peu mondaine, se rend au manoir d'Argol [situé en Bretagne (p. 39), entre la forêt de Storrvan (p. 39) et la mer (p. 47)], qu'il a acheté un mois plus tôt sans le visiter, sur les recommandations d'un ami très cher.

Quelques jours plus tard, il y est rejoint par Herminien, un autre ami très cher, à la fois son double et son contraire, et Heide, qu'il ne connaît pas mais dont Herminien est amoureux. Ils risquent tous les trois la noyade lors d'un bain en pleine mer, et ce risque révèlent l'ambiguïté et la puissance des sentiments qui animent ces trois êtres.

Des pluies à répétition, le désœuvrement, un malaise qui s'installe insidieusement, ont raison d'Herminien, qui disparaît du château (p. 129).

L'automne arrive. Albert et Heide portent secours à Herminien blessé dans un accident de cheval. Albert et Herminien retrouvent leurs relations d'antan.



> Qu'est-ce qu'une inversion de mots ?



L'ordre des mots dans la phrase.

Inverser un mot ou des mots dans une phrase, c'est modifier l'ordre de ces mots dans la phrase, c'est déplacer un ou des mots de leur place habituelle, créant ainsi un effet de style.

Dans la chaîne parlée et sa représentation linéaire écrite, les mots apparaissent dans la phrase les uns après les autres ; ils se présentent dans un certain ordre. Dès qu'un certain ordre tend à être habituel, tout changement se présente comme une inversion pouvant avoir une valeur expressive. Toutes les langues ont des cas où l'ordre des mots est rigoureusement fixe et des cas où se manifeste une certaine liberté. Dans une langue donnée, quand il existe une certaine liberté dans l'ordre des mots, on parle d'ordre grammatical, ou ordre canonique pour celui qui est le plus conforme aux règles générales de la langue ; d'ordre logique pour celui qui paraît conforme à la démarche supposée de la pensée ; d'ordre psychologique pour celui qui résulte de l'état d'esprit de celui(celle) qui parle.



L'ordre des mots dans la phrase française est régi par deux types de facteurs : par des contraintes grammaticales, et par des priorités d'expressivité ou de rythme. L'ordre sujet-verbe-complément est l'ordre canonique de la phrase en français. Lorsque des facteurs expressifs prennent le dessus, un mot ou un groupe de mots peuvent occuper des places fort différentes, par détachement ou par segmentation, afin d'être mis en relief. Exemple : Quand je passai de France en Italie, LA FRONTIÈRE, c'était un mardi, en été, au lieu de : Quand je passai LA FRONTIÈRE entre la France et l'Italie, c'était un mardi, en été ; le déplacement de la frontière met ce mot en valeur, et insiste sur son importance pour l'auteur.



On remarquera aussi que la langue poétique bouleverse fréquemment l'ordre des mots, jusqu'à la dislocation des liens syntaxiques. Par exemple avec le début de ce poème de Paul-Jean Toulet [écrivain français, 1867-1920], intitulé : Ces roses pour moi, in Les Contrerimes (1921) :



Ces roses pour moi destinées

Par le choix de sa main,

Aux premiers feux du lendemain,

Elles étaient fanées.

Si l'on rétablit et la syntaxe et le sens, cela pourrait donner le poème suivant, qui n'a ni la grâce, ni l'élégance du poème originel :

Ces roses étaient fanées,

Aux premiers feux du lendemain.

Ces roses qui m'étaient destiné,

Par le choix de sa main.



Qu'est-ce qu'une anastrophe ?

Une anastrophe est un terme de grammaire, une figure de construction, un renversement de l'ordre habituel des mots dans la phrase. Exemple : Me voici est l'anastrophe de : Voici moi (en latin : Mecum au lieu de Cum me).



L'inversion, le déplacement d'un mot ou d'un groupe de mots par rapport à l'ordre normal ou habituel de la construction d'une phrase, était fréquent en grec ancien et en latin.



L'inversion du complément déterminatif était très fréquente dans la poésie classique. Un complément déterminatif est un complément de nom (d'adjectif ou d'adverbe) qui se subordonne au nom (à l'adjectif ou à l'adverbe), le plus souvent par une préposition, pour en limiter l'extension. Exemples : Un manteau D'HIVER, ou : Il est incapable DE CELA.



Les poètes du XVIIIe siècle ont usé et abusé de l'anastrophe, qui obéissait souvent à des raisons de rimes. On la trouve parfois encore chez les romantiques. Exemples :



RESTAIT cette redoutable infanterie de l'armée d'Espagne.



Extrait de : Discours sur l'histoire universelle, de Jacques Bénigne Bossuet [prélat, théologien et écrivain français, 1627-1704, entré à l'Académie française en 1671].



Là, ses yeux, errants sur les flots,

D'ULYSSE FUGITIF semblaient suivre la trace.

(…) C'est ainsi QU'EN REGRETS sa douleur se déclare...



Extrait de : Morceaux choisis des prosateurs et des poètes français (p. 473), Cantate de Circé, de Jean-Baptiste Rousseau [poète français, 1671-1741, célébré de son temps comme le continuateur de Malherbe (François de, poète français, 1555-1628) et de Boileau (Nicolas, écrivain français, 1636-1711, historiographe du roi en 1677, entré à l'Académie française en 1684)].



(…) Le bras fatal, SUR SA TÊTE étendu,

Prêt à frapper, tient le fer suspendu.

(…) Le couple affreux, d'une ardeur unanime,

Suit son objet, va droit à sa victime,

L'atteint, recule, et, DE TERRE élancé,

Forme cent nœuds, AUTOUR D'ELLE enlacé.



Extrait de : Morceaux choisis des prosateurs et des poètes français (p. 487), Les Deux serpents, de Jacques de Clinchamp de Malfilâtre [poète français, 1733-1767].



En vain il a DES MERS fouillé la profondeur.



Extrait de : Nuit de mai, d'Alfred de Musset [écrivain français, 1810-1857 ; introduit dès 1828 dans le Cénacle (entre 1823 et 1830, groupe qui se constitua d'abord chez Charles Nodier, ensuite chez Victor Hugo, pour définir les idées du romantisme naissant et lutter contre le formalisme classique) ; entré à l'Académie française en 1852].



Vous qui songez aux morts SOUS LA TERRE étendus.



Extrait de : Morceaux choisis des prosateurs et des poètes français (p. 512), Les Naufragés, Poèmes de la mer, de Joseph Autran [poète marseillais, 1813-1877, considéré en son temps comme le plus grand poète de son siècle après Victor Hugo, entré à l'Académie française en 1868].



Sans LIEN aucun (anastrophe de : Sans aucun lien).



D'HIVER le manteau, avec sa douce fourrure épaisse et blanche

(anastrophe de : Un manteau d'hiver, avec sa douce fourrure épaisse et blanche).



DE CELA, il est incapable (anastrophe de : Il est incapable de cela).



Le nom féminin une anastrophe est un emprunt (1718) au grec anastrophê (retournement), composé de ana- (de bas en haut, en arrière, en sens inverse, de nouveau) et de strophê (tour). Ana- est un mot grec dont l'origine indoeuropéenne est apparentée au gotique ana (contre) et au vieux perse anā (le long de). Le mot grec strophê (tour), employé spécialement pour parler des évolutions du chœur lyrique sur la scène et de l'air chanté par le chœur, et par figure au sens de ruse, dérive de strephein (tourner), verbe d'origine inconnue.



Les effets de l'anastrophe sont multiples : esthétique (la phrase À vivre nous aide le langage est moins banale et nous transporte plus facilement dans un autre univers que : Le langage nous aide à vivre), sémantique (les expressions Un homme grand et Un grand homme n'ont pas le même sens en français : on parle de la taille du physique d'un homme dans la première, et dans la deuxième expression, on parle de la notoriété et du prestige de ce même homme ; en résumé et sans ironie Un homme petit peut être un grand homme), rythmique, poétique (certaines inversions de mots à l'intérieur d'un vers obéissent au besoin de la rime), etc.



AUX JARDINS À L'ANGLAISE, il préfère l'ordonnance à la française

(anastrophe de : Il préfère l'ordonnance à la française aux jardins à l'anglaise).



on l'utilisait dans la médication des maladies nerveuses contre lesquelles ÉTAIT INVOQUÉ ce saint (anastrophe de : ...contre lesquelles ce saint était invoqué). Il me narrait, à ce propos, qu'un jour, ENTRE CHEZ LUI une dame qu'il ne connaissait point... (anastrophe de : ...qu'un jour, une dame qu'il ne connaissait point entre chez lui).



Extrait de : En ménage, de Georges Charles Huysmans [écrivain français, 1848-1907, entré à l'Académie Goncourt en 1897].



Il ne sent que les odeurs habituelles et tout particulièrement celles

qui DE LA CAVE émanent.



Extrait de : Zazie dans le métro, de Raymond Queneau [écrivain français, 1903-1976, entré à l'Académie Goncourt en 1951 ; a créé en 1960 l'OuLiPo avec François Le Lionnais ; acronyme de : Ouvroir de Littérature potentielle, l'OuLiPo est un atelier d'expérimentation littéraire qui cherche à réintroduire la notion de contrainte formelle dans la création littéraire].



> Extrait de Au château d'Argol (1938) de Julien Gracq (pp. 82-83, 110 et 182), où les inversions sont en majuscule.



Au milieu même de la LONGUE nuit de décembre, PAR LES ESCALIERS DÉSERTS, PAR LES SALLES DÉSERTES, AUX FLAMBEAUX ÉTEINTS, AUX FLAMBEAUX RENVERSÉS, il quitta le château sous l'habit du voyageur. TRÈS VITE ses pas le conduisirent (car il se hâtait dans la nuit froide) vers l'allée magique qu'Albert et Heide avaient suivie en un jour fatal. Les pans flottants de son manteau l'environnaient comme des ailes noires.

[…] Alors, DU FOND DE SON INQUIÉTUDE un son s'éleva, qui parut emplir en un instant la chapelle et ruisseler le long des murs luisants d'eau, et ALBERT, SANS OSER SE RETOURNER, TELLEMENT CET ACCORD LE CONFONDAIT PAR SON AMPLEUR INOUÏE, devina alors qu'Herminien, PENDANT SON EXPLORATION SILENCIEUSE, avait gravi les degrés de pierre d'un orgue qui s'élevait dans l'obscurité à gauche de la porte et occupait une partie considérable de la chapelle, mais de l'examen duquel avaient dû le distraire aussitôt les effets séduisants de l'éclairage.

[…] Mais lorsque le soir refaisait pour lui dans le grand salon l'unité d'un monde qui y paraissait alors tout entier contenu, une TRÉPIDANTE exaltation s'emparait de son esprit. Avec la ferveur d'un demi-délire, avec une espèce de volubilité étourdissante, il projetait alors ses paroles comme les mailles d'un filet dont il eût voulu, D'UNE ÉTREINTE DÉSESPÉRÉE, envelopper son âme qui lui semblait DÉSORMAIS séparée de lui par l'effet d'une malédiction atroce. IL EÛT VOULU, pour la retenir, pour la garder, pour la charmer, peupler le salon et le manoir entier de ses arabesques dangereuses, de ses BOULEVERSANTES incantations, AVEC UNE PRÉVOYANCE MERVEILLEUSEMENT ACTIVE jalonner d'avance de ses pensées toutes les avenues qui pouvaient s'ouvrir à l'âme de Heide – distendre son esprit jusqu'aux limites extrêmes du monde comme un tapis magique et vivant, aux fleurs géantes, hors duquel JAMAIS son pied ne pût trouver la chance de s'égarer.

Et avec un acharnement sublime, dans le défi insensé de son cœur, chaque soir à nouveau SE TISSAIT ce filet de Pénélope au tissu arachnéen, que Heide crevait à chaque instant en se jouant et sans s'en apercevoir MÊME, mais dont Albert sentait tomber sur lui les mille replis à la façon d'une ombre sur son cerveau.



> Exercices et consignes d'écriture.



1. Relever tous les noms communs de l'extrait de texte cité plus haut :

Le milieu, la nuit, l'escalier, la salle, le flambeau, le château, l'habit, le voyageur, le pas, la nuit, l'allée, le jour, le pan, le manteau, l'aile, etc.



2. Relever tous les adjectifs qualificatifs de l'extrait de texte cité plus haut :

Longue, désert, éteint, renversé, froide, magique, fatal, flottant, noir, etc.



3. Écrire un texte d'une trentaine de lignes, en utilisant tous les noms et adjectifs précédemment relevés, et en inversant certains mots ou certains groupes de mots à des fins d'esthétique (pour obtenir un tour de phrase moins banal), de sémantique (choisir un sens particulier d'un mot lorsque celui-ci en possède plusieurs), de rythme, de sonorité ou de poésie.



Avec les noms communs suivants : le milieu, la nuit, l'escalier, la salle, le flambeau, le château, l'habit, le voyageur, et avec les adjectifs qualificatifs suivants : longue, désert, éteint, renversé, froide, magique, fatal, cela pourrait donner ceci :

Par une nuit magique, une panne d'électricité avait éteint toutes les lumières des lampadaires, et magique nuit librement, les étoiles scintillaient sans entraves dans la nuit noire, noire rue, je déambulais le nez en l'air. Fatale fut ma distraction : je ne vis pas la première marche de l'escalier, la cheville je me foulai, je me tordis le bras, de douleur je hurlai.

Je revins à moi allongé sur le sol en terre battue d'une longue salle déserte ; un flambeau à terre renversé projetait ses incertaines lueurs sur les pierres disjointes d'un vieux mur. On aurait dit les oubliettes d'un château hanté. Difficilement, je me levai en prenant appui sur le mur froid. Je ne portais plus les mêmes habits, un voyageur j'étais devenu. Je partis donc en voyage...



Et maintenant...

À vous de jouer - et d'écrire,

À vos claviers, plumes et stylos !



Bibliographie :

-> Remarque : la bibliographie qui suit donne les références des ouvrages consultés pour rédiger le contenu des ateliers hebdomadaires et mensuels.

Pour connaître plus précisément le numéro de la page qui traite de la notion recherchée, consulter la bibliographie qui se trouve à la fin de chaque atelier hebdomadaire.



> BOURDEREAU, Frédéric, FOZZA, Jean-Claude, [et al.], 1996. Précis de français : langue et littérature. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan).



> CRESSOT Marcel, JAMES Laurence (mise à jour), 1991. Le style et ses techniques : précis d'analyse stylistique. Paris, Presses universitaires de France. 13e éd.



> DUBOIS Jean, GIACOMO Mathée [et al.], 1999. Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage. Paris, Larousse.



> Encyclopædia Universalis 2009, édition numérique.



> GRACQ, Julien. Au château d'Argol. Paris : Librairie José Corti, 2007. 182 p.



> Le Grand Robert de la langue française, 2001, 2e éd. 6 vol.



> Le Petit Robert des noms propres, 2007.



> PEYROUTET, Claude, 1994. Style et rhétorique. Paris, Nathan (coll. Repères pratiques Nathan).



Contact : numencegalerielitteraire@gmail.com



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atelier d'écriture et publication

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