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L
a – P U B L i
a n c e
atelier d'écriture et publication
. . . . . . . . e n – l i g n e . . . . . . . .
atelier d'écriture et publication
. . . . . . . . e n – l i g n e . . . . . . . .
« Capitaine
d'un navire en pleine tempête intérieure, je naviguais,
secouée par des orages de cœur, aveuglée par des éclairs
de colère, et je prenais mes décisions avec la précision
et la rapidité de la foudre. »
Allégorie
Dans
la rhétorique
antique1,
l'allégorie
fait partie des 13
figures ou tropes2,
qui rassemblaient 13
figures de style :
l'onomatopée,
la catachrèse,
l'épithète, la
métaphore, la périphrase, la
métalepse, la métonymie, l'antonomase, l'hyperbate, la fable,
l'hyperbole et
la synecdoque.
Cette
jeune plante, ainsi arrosée des eaux du ciel, ne fut pas longtemps
sans porter des fruits.
Bossuet3
cité par Antoine Albalat, dans : L'art
d'écrire enseigné en vingt leçons
(1924, p. 277).
Au
XIXe siècle, une allégorie est une sorte de métaphore4
continuée, une espèce de discours qui est d'abord présenté sous
un sens propre, et qui ne sert que de comparaison pour donner
l'intelligence d'un autre sens qu'on n'exprime point. Quand
Pythagore5
disait : N'attisez point le feu avec l'épée, il voulait
dire : Ne donnez pas des armes à des gens en colère ;
il n'interdisait pas d'employer une épée pour attiser un feu. C'est
une figure de style qui procède par analogie, par laquelle on
représente un objet pour donner l'idée d'un autre
Au
XXe siècle et en linguistique, une allégorie est une
description ou un récit consistant en la personnification d'un être
abstrait (la justice, la guerre, etc.) dans une suite de métaphores
(par l'emploi de mots concrets pour exprimer des notions abstraites),
en général à valeur didactique (en vue d'un apprentissage par la
parabole, le proverbe ou la fable).
D'une
manière plus générale et en littérature, une allégorie est une
narration mettant en œuvre des éléments concrets, de manière
cohérente (selon une isotopie6),
chaque élément correspondant métaphoriquement ou symboliquement7
à un contenu de nature différente, en général abstrait.
AGORA
ET DISCOURS MÉTAPHORIQUE
Étymologiquement,
le nom féminin allégorie vient (1119) par le latin
allegoria, du grec tardif allêgoria, dérivé du verbe
allêgorein (parler par figures), composé de allos
(autre) et de agoreuein (parler, parler en public), dérivé
de agora (place publique et assemblée du peuple). L'allégorie
est donc une « parole différente ».
Employé
en français aux sens grec et latin de « discours
métaphorique », le mot se spécialise dans l'usage classique
(XVIIe siècle) pour désigner une narration dont tous les
éléments concrets organisent un contenu différent, souvent
abstrait.
Par
ailleurs, allégorie désigne aussi une œuvre littéraire
utilisant ce mode d'expression, ce type de narration, on parle alors
de narration allégorique.
L'ALLÉGORIE
MÉDIÉVALE
Le
Roman de la Rose (roman en octosyllabes commencé vers 1220
par Guillaume de Lorris, et continué par Jean de Meung vers 1275)
est une belle et longue allégorie de l'amour. Bien des œuvres
médiévales rebutent le lecteur moderne par leur forme allégorique,
étrangère à ses habitudes intellectuelles. Au moyen âge,
l'allégorie n'est pas un « genre », mais une forme
d'écriture et une structure sémantique qui pénètre tous les
genres. L'allégorie médiévale se distingue par son extrême degré
de codification et par sa complexité, car elle n'est pas uniquement
procédé littéraire de représentation, mais aussi moyen
d'explication et de connaissance du monde, expression d'une
« mentalité » soucieuse de trouver partout les
correspondances entre la matière et l'esprit, entre le cœur et la
raison, entre le concret et l'abstrait, entre l'amour (courtois et
raffiné) et la nature (la raison, le rationnel).
Ci
est le Rommant de la Rose,
Où tout l'art d'Amours est enclose.
Maintes gens disent que les songes
Ne sont que fables et mensonges ;
Mais on peut tels songes rêver,
Qui ne sont pas mensongers ;
Extrait de : Le roman de la rose (1220-1275), par Guillaume de Lorris et Jean de Meung (Paris, Fournier et Didot, 1799, p. 73).
Où tout l'art d'Amours est enclose.
Maintes gens disent que les songes
Ne sont que fables et mensonges ;
Mais on peut tels songes rêver,
Qui ne sont pas mensongers ;
Extrait de : Le roman de la rose (1220-1275), par Guillaume de Lorris et Jean de Meung (Paris, Fournier et Didot, 1799, p. 73).
L'allégorie
est issue d'une très ancienne tradition : née en Grèce chez
les commentateurs d'Homère (poète
ionien
qui vécut au IXe
siècle av. J.-C., à qui l'on
attribue l'Iliade
et l'Odyssée,
et auteur de très
populaires Épopées),
elle est adoptée par la théologie chrétienne comme lecture
privilégiée du texte sacré. Elle relève de deux courants de
réflexion qui se rejoignent au XIIe siècle :
l'héritage de la rhétorique antique perpétuée dans les écoles,
et le travail d'exégèse biblique (interprétation d'un texte
religieux dont le sens et la portée sont obscurs ou sujets à
discussion).
Le
temps a laissé son manteau
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.
De vent, de froidure et de pluie,
Et s'est vêtu de broderie,
De soleil luisant, clair et beau.
Extrait
d'un rondeau : Le temps a laissé son manteau, de Charles
d'Orléans [1391-1465], dans : Dictionnaire anthologique des
classiques de la poésie française,
éd. Pierre Ripert (Maxi-Livres-Profrance, 2001, p. 49).
éd. Pierre Ripert (Maxi-Livres-Profrance, 2001, p. 49).
La
finalité de l'allégorie est la création d'un double sens, qui
passe par l'affirmation explicite de la nécessité de lire au-delà
du sens immédiat (à cause d'invraisemblance ou d'insuffisance du
sens premier, ou à cause d'oppositions lexicales :
lettre-vérité, matière-sentence), afin de révéler ou de désigner
une signification cachée. L'allégorie se construit par une
juxtaposition d'images (métaphores narratives ou métaphores
descriptives) et leur commentaire.
Elle
peut procéder par personnification, avec laquelle elle est souvent
et sommairement confondue : la notion prend l'apparence concrète
d'un être animé dont les actions ou l'aspect engendrent un sens
métaphorique. L'allégorie par la personnification d'une notion
offre simultanément la signification, l'idée et la représentation
de cette notion. Exemple avec l'hypocrisie personnifiée par le
renard, dont la ruse (la ruse supposée du renard) est le
comportement de tous les hypocrites, et la chasse (la chasse au
renard) celui des hommes victimes de la satire (hommes chassés de la
société humaine par la satire des hypocrites, mais aussi hommes qui
partent en chasse contre la satire et contre l'hypocrisie humaine).
Du
XIIIe siècle au XVe siècle, l'allégorie est
l'un des procédés littéraires les plus conscients, les plus
sophistiqués et les plus originaux. Répondant à un désir de
rationalisation de l'univers, elle cherche à créer des liens entre
la représentation de la réalité et l'abstraction. Elle est la
solution du moyen âge à un problème important du langage et de la
littérature : faire voir par l'intermédiaire des mots, donner
au signifié une existence palpable, combler le fossé entre le texte
et l'image. Aux siècles suivants, l'allégorie ne mourra pas,
certes, mais elle deviendra un jeu et elle perdra cette référence à
l'harmonie de l'univers qui faisait sa grandeur.
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Notes
1.
Rhétorique antique :
la rhétorique est l'art
de bien dire ou l'art de parler de manière à persuader. On appelle
rhétorique l'ensemble des procédés constituant l'art oratoire,
l'art du bien dire. La rhétorique comporte trois composantes
essentielles : l'invention (thèmes et arguments), la
disposition (arrangement des parties), et surtout l'élocution (choix
et disposition des mots ; étude des figures ou tropes) ;
on y ajoute parfois la prononciation (ou mode d'énonciation) et la
mémoire (ou mémorisation). Dans l'antiquité gréco-romaine,
Quintilien (rhéteur
latin, vers 30 – vers 100),
Aristote (philosophe grec,
-324 - -322), Cicéron
(homme politique et orateur latin, -106 - -43), Longin (philosophe et
rhéteur grec, vers 213 - 273), Gorgias
(sophiste grec, - 487 -
-380), etc.
furent des rhéteurs célèbres.
2.
Un trope
est une figure de rhétorique par laquelle un mot ou une expression
sont détournés de leur sens propre.
3.
Jacques Bénigne Bossuet
est un prélat, un
théologien et un écrivain français (1627-1704), entré
à l'Académie française en 1671.
Auteur de Sermons,
d'Oraisons funèbres
(1656-1687), d'un
Discours sur l'histoire
universelle (1681),
d'une
Déclaration du clergé
de France (1682), etc.
Dans ses œuvres parlées, une période (une
période est une phrase complexe dont les membres composants sont
groupés de telle façon que, si variés qu'ils soient dans leur
structure, leur assemblage donne une impression d'équilibre et
d'unité) une période
puissamment rythmée, aux
accents expressifs, un vocabulaire riche et adapté à l'auditoire et
le lyrisme des images donnent au discours un pouvoir poétique
indiscutable.
4.
Une métaphore
est une figure de
rhétorique qui consiste à désigner un objet du nom d'un autre
objet présentant avec le premier des rapports d'analogie. Dans
l'exemple suivant : « La
mort de sa tante fut pour la
jeune fille une
source de chagrins »,
« une source de
chagrins » est
la métaphore par analogie
de « la mort de
sa tante ».
5.
Pythagore
est un philosophe et un mathématicien grec (-VIe
siècle) dont la vie et l’œuvre sont mal connues. Les découvertes
qu'on lui attribue sont certainement dues à l'ensemble de l'école
pythagoricienne : les théorèmes (mis en ordre par Euclide au
-IIIe
siècle), la découverte de la relation qui existe entre la longueur
d'une corde vibrante et la hauteur du son qu'elle émet (acoustique),
la théorie des proportions, la table de multiplication, les nombres
irrationnels, etc.
6.
Une isotopie
est le fondement d'un
raisonnement, le sujet ou la matière d'un discours. Ce mot a été
créé et employé par Algirdas
Julien
Greimas (sémanticien et
sémioticien français, 1917-1992) et
ses disciples (l'École de
Paris) pour désigner un
ensemble de catégories sémantiques (de
groupes de significations),
repérables en plusieurs
points de l'énoncé du discours, qui permettent d'assigner une
valeur unique et cohérente aux unités ambiguës dans le discours.
Par exemple, l'isotopie « concret »
permet de comprendre l'énoncé : « Les
Californiens craignent les avocats véreux, qui craignent les fruits
nommés avocats lorsqu'ils ont des vers ».
7.
Un symbole
est un objet ou un fait
naturel perceptible et identifiable, qui évoque, par sa forme ou sa
nature, une association d'idées « naturelle » (dans un
groupe social donné) avec quelque chose d'abstrait ou absent.
En littérature et
spécialement en poésie, c'est un élément ou un énoncé
descriptif ou narratif qui est susceptible d'une double
interprétation, sur le plan réaliste et sur le plan des idées.
Dans le poème d'Edgar Poe par
exemple, le corbeau est le
symbole du souvenir. L'allégorie
est le développement logique, systématique et détaillé du
symbole. Dans la poésie lyrique par
exemple, l'image
allégorique
de la rose apparaît souvent comme le symbole de la beauté, de la
pureté ou de l'amour.
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Consigne :
choisir une notion parmi les notions proposées. Puis, jeter (écrire)
sur le papier (ou sur l'écran de son ordinateur, de sa tablette ou
de son mobile) les mots, les phrases ou les lambeaux de phrases, les
images ou les idées (empruntées - ou non, à des écrivains), qui
viennent à la suite de ce choix (laisser parler son imaginaire, sa
raison, son inconscient et son cœur). Ensuite, construire des
allégories à partir de ce réservoir de mots et de groupes de mots.
Pour s'aider, on peut avoir dans l'idée de créer (de recréer ?)
un univers, en concrétisant la notion par l'image, en la
personnifiant, en l'animant d'un corps, d'un esprit, d'une parole,
d'un caractère... Enfin, composer un texte de quelques phrases, un
texte allégorique.
Notions
proposées : le bonheur, la joie, la mort, la nuit, le temps, la
colère, etc.
Avec
« la nuit », cela pourrait donner cela :
Allégories :
une nuit blanche, une
nuit calme et sereine, la
nuit vient brusquement, se
laisser surprendre par la nuit, nuit d'encre, profonde, une nuit
chaude et étouffante qui monte de la terre, le chant de la terre, la
nuit allume ses premières étoiles, la nuit guidant son cortège
d'étoiles étincelantes, la nuit pensive, la chevelure sombre d'une
nuit sans lune, la pâle nuit lève son front dans les nuées (Victor
Hugo), les étoiles et la mort filles feux de la nuit, le sommeil
fils de la nuit, la grande robe obscure de la nuit (Clément Marot),
la douce nuit qui marche (Charles Baudelaire), noir pirate débarquant
(Arthur Rimbaud), la nuit qui voile toute beauté toute vérité, la
nuit est la paupière du monde et de la lumière, la nuit s'avance
lentement, l'immobilité et le silence de la nuit, la nuit
consolatrice du jour (Alfred de Vigny), les yeux de la nuit, que les
chevaux de la nuit à petits pas réduits en fassent la plus longue
des nuits (Molière), cette nuit cruelle qui fut pour tout un peuple
une nuit éternelle (Jean Racine), la beauté brune de la nuit
(Bernard de Fontenelle), une silhouette recouverte d'un voile semé
d'étoiles portée sur un char traîné par des chevaux noirs, les
ailes de la nuit qui n'a point de honte recouvrent moult
imperfections et maintes poltronneries (Pierre de Brantôme), etc.
Texte
allégorique sur la nuit :
Je
te fixe dans les yeux, nuit sombre et pensive dont l'ample chevelure
balaye mes doutes comme la queue du chat agacé qui fouette l'air. Je
n'y vois plus rien, je ne distingue plus la route devant moi. Une
nuit africaine profonde calme et sereine s'est brusquement élevée
de la terre, accompagnée des chants de la multitude, guidant son
cortège d'étoiles étincelantes et gaies. J'arrête la voiture et
je coupe le moteur. Ma nuit est blanche. Toi, l'enfant que je ramène
de là-bas, d'un lointain village de brousse, tu dors paisiblement
abandonné sur la banquette. Pays en guerre, journaliste de guerre,
enfant de roi, enfant de la nuit, nous nous sommes tous laissés
surprendre, enfants, rois, journalistes, pays, par une nuit sans fin,
noir pirate débarquant et pillant et tuant. Une nuit qui n'a point
de honte et dont les ailes recouvrent moult imperfections et maintes
poltronneries, moult cris et maintes abominations. Quelle nuit
consolatrice verra le jour ? En quel jour reviendront ces
beautés brunes ? Dans combien de temps réapparaîtront ces
douces nuits dont les fronts pâles s'élèvent dans les nuées ?
En attendant cette nuit est cruelle et pour tout un peuple restera
une nuit éternelle.
Et maintenant...
À vous de jouer - et d'écrire,
À vos claviers, plumes et stylos !
À vous de jouer - et d'écrire,
À vos claviers, plumes et stylos !
.
¤ . ¤ . ¤
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Bibliographie :
BEAUMARCHAIS
(Jean-Pierre
de),
COUTY (Daniel),
REY (Alain),
Dictionnaire
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nouvelle
édition mise à jour et enrichie, Paris,
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1, pp.
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DUBOIS
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GIACOMO (Mathée),
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Gallica.bnf.fr
(site internet), bibliothèque
numérique
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LITTRÉ
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Dictionnaire
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Le
Petit Robert des noms propres,
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REY
(Alain,
dir.), Dictionnaire
historique de la langue française,
nouvelle
édition, Paris,
Dictionnaires
Le Robert, 1993,
2 vol., p.
46.
L
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