mercredi 25 mars 2015

L'assonance, atelier d'écriture bimensuel de La Publiance


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L a – P U B L i a n c e
atelier d'écriture et publication
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« J'ai appris la vie lorsqu'il a souri. »

L'assonance

La versification française traditionnelle est fondée sur la rime, c'est-à-dire sur le fait que les voyelles toniques (la dernière syllabe à voyelle prononcée d'un mot) et leur suite éventuelle sont identiques à la fin de deux vers ou plus.

Remarque : l'e muet ne porte pas d'accent tonique même quand il est prononcé (sauf dans des mots grammaticaux : Prends-LE, Sur CE je suis sorti, etc.).

Exemple de rimes avec ces vers du poète français Stéphane Mallarmé (1842-1898), extraits du poème : Brise marine (1865) :

La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres.
Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres

Différente de la rime (bien que semblable à elle par une même recherche d'homophonie), l'assonance est la répétition de la même voyelle phonique1 en position finale accentuée (du mot), quelle que soit la consonne d'appui2 ; c'est la forme la plus ancienne de la rime.

Dans un mot, si ce qui suit la voyelle tonique (ou accentuée) est différent, on a une assonance, et non une rime : exemple avec « une trace » et « une frappe », où la voyelle tonique de ces deux mots est « a » (tráce, fráppe), suivie de « -ce » pour « trace », et de « ‑ppe » pour « frappe ».

ACCENT TONIQUE

Par l'accent tonique ou d'intensité, on articule la dernière syllabe d'un mot avec plus de force que les autres, par exemple : « Il laissa tomBER son chaPEAU », « Il vienDRA », « Viendra-t-IL ? », « Une quesTION », « Une calamiTÉ ».

En français, l'accent tonique n'est pas un phénomène conscient, et il ne joue pas un rôle distinctif. Dans la plupart des autres langues, l'accent est plus nettement marqué, comme en italien par exemple, où le choix de la voyelle accentuée change la signification d'un mot : áncora (ancre) et ancóra (encore).

L'ÉCHO D'UNE MÊME VOYELLE PHONIQUE ACCENTUÉE

Une assonance est la répétition de sons voyelles à des fins d'harmonie : « Les couchants langoureux des pensives zélandes » (extrait du poème : Souvenir des Flandres, de Guillaume Apollinaire, poète français, 1880-1918).

L'assonance, où cette sorte d'écho ne porte que sur la voyelle accentuée du dernier mot, est bien distincte de la rime, où non seulement la voyelle accentuée, mais les consonnes qui la précèdent ou la suivent sont identiques. L'assonance, qui est seule employée dans nos plus anciennes chansons de geste, comme la Chanson de Roland, s'est conservée dans certaines chansons populaires.

Extrait de : Précis de grammaire historique de la langue française (1887), de Ferdinand Brunot3 et Charles Bruneau (Paris, Masson, 3e éd., 1949, p. 701).

Donc, d'une manière plus précise, une assonance est la répétition de sons voyelles accentués, quelles que soient les lettres qui suivent ou qui précèdent le son voyelle répété : « Sous le ciel grand ouvert la mer ferme ses ailes » (extrait du poème : Corps idéal, dans : Le dur désir de durer (1946), de Paul Éluard, poète français, 1895-1952).

CONSONANCE IMPARFAITE

Au XIXe siècle, une assonance est une consonance imparfaite ; une consonance parfaite, c'est lorsque deux ou plusieurs mots se terminent par les mêmes sons. Ainsi, « France » et « transe » sont deux rimes parfaites, mais « France » et « branche » sont des rimes (des consonances) imparfaites ou des assonances. Les plus anciens poèmes en langue française ont l'assonance et non la rime.

Les assonances de l'ancienne langue sont naturellement fondées sur des prononciations disparues. C'est ainsi que dans la Chanson de Roland, fleur (flur) et preux (prod) assonent avec poumon (pulmun), non (nun), baron.

Extrait de : Précis de grammaire historique de la langue française (1887), de Ferdinand Brunot3 et Charles Bruneau (Paris, Masson, 3e éd., 1949, p. 734).

Le mot féminin « une assonance » est un emprunt d'époque classique (avant 1690) à l'espagnol « asonancia » (1625), lui-même du latin « assonans », participe présent du verbe « adsonare » (répondre à un son par un autre son, répondre en écho). Il s'emploie en rhétorique et en poésie, pour désigner la répétition de la voyelle accentuée à la finale de mots successifs ou en fin de vers, différemment de la rime. L'exemple suivant est une assonance : « Je vois ma belle, en vrai et en rêve », tandis que l'exemple suivant (extrait de : Épître LXXV, de Clément Marot, poète français, 1496-1544) est une rime : « Rythme et raison, ainsi comme il me semble / Doivent toujours être logés ensemble ».

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Notes

1. L'alphabet phonétique, qui transcrit graphiquement et d'une manière univoque les sons d'une langue, comporte en français 16 voyelles phoniques ([i] il, vie, lyre ; [e] blé, jouer ; [aplat, patte ; [ɛlait, jouet, merci, fête ; [ɑbas, pâte ; [ɔ] fort, donner ; [omot, dôme, eau, gauche ; [ugenou, roue ; [yrue, vêtu ; [œ] meuble, chanteur, œil ; [ø] peu, deux, chanteuse ; [əle, premier ; [ɛ̃matin, plein, bain ; [œ̃lundi, brun ; [ɔ̃] bon, ombre ; [ɑ͂] sans, vent, temps), 3 semi-voyelles ou semi-consonnes ([j] yeux, paille, pied ; [w] oui, jouet ; [ɥ] huile, lui) et 23 consonnes phoniques. Le son est marqué entre crochets carrés [], tandis que les mots qui le suivent donnent un exemple de prononciation des différentes valeurs du signe.

2. Une consonne d'appui est la consonne placée juste avant la dernière voyelle de la rime, en versification. Dans les deux alexandrins de Stéphane Mallarmé : « La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres. / Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres », les consonnes d'appui sont : « l » pour « livres » et « t » pour « ivres ». Petit rappel : l'e muet final des mots « livres » et « ivres » ne se prononce pas, donc l'accent tonique des mots est porté par l'i : « lívres » et « ívres ». Dans la phrase suivante : « J'ai dit à ma mie mon amour pour toujours», les consonnes d'appui des assonances (voyelles finales accentuées des mots) sont différentes : d pour dit et m pour mie, et, m pour amour et j pour toujours.

3. Ferdinand Brunot est un grammairien français et un historien de la langue française (1860-1938) ; il est l'auteur d'une Histoire de la langue française (1916-1938, inachevée et continuée dans un tout autre esprit, et du point de vue exclusif des usages littéraires, par Charles Bruneau) et d'un essai, La pensée et la langue (1922), dont la méthode intuitive va à l'encontre de l'évolution de la grammaire moderne.

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Consigne : choisir une ou plusieurs voyelle(s) phonique(s) dans l'alphabet phonétique (voir plus haut note 1), dresser une liste de mots contenant ce son (noms, verbes, adjectifs, etc.), puis construire un récit ou un poème de manière à alterner des phrases assonancées.

Avec les sons [o] et [u], et les mots : trop, rondeau, gâteau, hameau, beau, goût, bagou, camelot, cela pourrait donner ceci :

Trop de rondeaux j'ai composé, trop de gâteaux ai-je fabriqué, et j'ai habité tant de hameaux que j'ai perdu le goût du beau et le bagou du camelot. Etc.

Et maintenant...
À vous de jouer - et d'écrire,
À vos claviers, plumes et stylos !

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Bibliographie :

DUBOIS (Jean), GIACOMO (Mathée), [et al.], Dictionnaire de linguistique et des sciences du langage, Paris, Larousse, 1999 (collection Expression), p. 56.

Encyclopædia Universalis, 2008-2009, édition numérique, 1 CD-ROM, article intitulé : Versification, de Robert SCTRICK.

Le Grand Robert de la langue française, 2ème édition, Paris : Dictionnaires Le Robert, 2001, 6 vol., t. 1, pp. lviii, 888, t. 5, p. 2175.

GREVISSE (Maurice), GOOSSE (André), Le bon usage : grammaire française, 13ème édition, Paris, Louvain-la-Neuve, Duculot, 1993, p. 44.

Histoire de la littérature française des origines à nos jours (site internet), article : Les figures de style, l'assonance (http://www.la-litterature.com, page consultée en janvier 2015).

LITTRÉ (Paul-Émile), Dictionnaire de la langue française, nouvelle édition, Chicago, Encyclopædia Britannica Inc., 1991 (réimpression de l'édition de 1880), 6 vol. + 1 supplément, t. 1, p. 329.

Le Petit Robert des noms propres, nouvelle édition refondue et augmentée, 2007.

REY (Alain, dir.), Dictionnaire historique de la langue française, nouvelle édition, Paris, Dictionnaires Le Robert, 1993, 2 vol., p. 131.

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