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L
a – P U B L i
a n c e
atelier d'écriture et publication
. . . . . . . . e n – l i g n e . . . . . . . .
atelier d'écriture et publication
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« Moins
de deux minutes a
suffi », ou : « Moins de deux mois ont
suffi » ?
Accords
contradictoires et sylleptiques
La
rhétorique distingue deux sortes de syllepses : l'une
grammaticale,
l'autre oratoire.
Il
s'agit dans l'un et dans l'autre cas, selon l'étymologie, de
« prendre
ensemble »
différentes catégories grammaticales
ou sémantiques.
Le
nom féminin syllepse est un emprunt au bas latin (1660) des
rhétoriciens syllepsis, qui reprend le grec sullêpsis
(action de prendre ensemble), d'où compréhension et
spécialement accord grammatical selon le sens. Sullêpsis
dérive de sullambanein (prendre ensemble, réunir, qui
donna le mot syllabe).
Attention
à ne pas confondre la syllepse avec la synchyse
(qui est le bouleversement de l'ordre des mots dans la phrase :
« D'amour me font, Belle Marquise, vos beaux yeux mourir »
Molière, pour : « Belle Marquise, vos beaux yeux me font
mourir d'amour »), ou avec l'anacoluthe (qui est une
rupture dans la construction de la phrase : « Celui qui
n'est pas encore convaincu, c'est à lui que je m'adresse »,
pour : « Je m'adresse à celui qui n'est pas encore
convaincu ») ou encore avec le jeu de mots.
SYLLEPSE
GRAMMATICALE
La
syllepse grammaticale procède à partir d'un défaut d'accord
grammatical entre deux termes dont l'un s'accorde avec l'idée qui
sous-tend la proposition. Exemple : « Jamais
je n'ai vu deux personnes être si contents
l'un de l'autre »
(extrait de : Don
Juan
(1665),
de
Molière), au lieu de : « Jamais je n'ai vu deux personnes
être si contentes
l'une
de l'autre ». L'accord
des mots en genre et en nombre se
fait non
d'après la grammaire, mais d'après le sens.
On
parle de syllepse grammaticale lorsque dans une phrase, l'accord d'un
mot contredit le genre et/ou le nombre normaux du mot auquel il se
rapporte. Exemple avec
le pronom « nous » (ou « vous »), lorsque
celui-ci est employé pour un seul être :
« C'est
la musique qui vous met dans cet état-là ? murmurait-elle.
Nous sommes donc si sensible ? »
au lieu de : « ...nous sommes donc si sensibles ? »
(extrait de : Minuit
(1936),
de
Julien Green).
Lorsqu'il
s'agit d'un sujet collectif, par exemple avec les mots « un
groupe »,
« une foule »,
« une
troupe »,
« une
assemblée »,
« une
bande »,
lorsqu'il
s'agit d'un
ensemble de personnes ou d'objets, l'accord se fait au au
singulier
si l'on veut souligner qu'il s'agit d'un seul et même ensemble, ou
au
pluriel
si l'on insiste sur tous les éléments qui constituent cet ensemble.
Exemples :
« Une
foule de visiteurs se précipitèrent (se précipita) » dès
l'ouverture des portes » ;
« L'assemblée
exclusivement composée de très jeunes femmes se mirent (se mit) à
frissonner dans la
fraîcheur matinale ».
SYLLEPSE
ORATOIRE
Une
syllepse oratoire, appelée
aussi syllepse
de sens,
consiste à prendre dans la même phrase un mot dans son sens propre
et dans son sens figuré.
Exemple :
« Je
percerai le cœur
que je n'ai pu toucher »
(extrait de : Andromaque
(1667),
de
Jean Racine), où
le mot « cœur » est ici à la fois l'organe vital et la
métaphore du lieu de la sensibilité affective ; Ou encore :
« Un
père,
en punissant, madame, est toujours père ;
un
supplice léger suffit à sa colère. »
(extrait
de : Phèdre
(1677),
de Jean Racine), où « le père » est à la fois un titre
et une qualité (sens propre du mot), et une personne qui, même
dans ses rigueurs, éprouve
les sentiments et possède le cœur bon et tendre d'un père (sens
figuré).
Fontanier1
précise que le mot pris au sens propre et au sens figuré, peut
l'être par métonymie2,
par synecdoque3
ou par métaphore4.
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Notes
1.
Pierre Fontanier
(1768-1844) est l'éditeur
en 1818 du « Commentaire
des tropes » de
Du Marsais et l'auteur de deux ouvrages sur les figures du
discours, « Manuel
classique pour l'étude des tropes »
(1821) et « Des
figures autres que tropes »
(1827). Pierre Fontanier est considéré parfois comme le fondateur
de la rhétorique moderne, notamment parce que son « Traité
général et complet des figures du discours »
(2 vol.) fut adopté comme manuel dans l'enseignement public, mais
aussi parce que, poussant plus loin et avec plus de rigueur
l'entreprise de Du Marsais, il réduit les tropes à trois
figures exemplaires : la métonymie, la synecdoque et la métaphore.
Comme son illustre devancier avait déjà reconnu le lien entre les
deux premières, on peut tenir cette double offensive comme l'acte de
naissance en deux temps de la rhétorique actuelle qui appuie ses
analyses sur la bipolarisation métaphore/métonymie. On a pu dire
que, plusieurs générations avant le structuralisme de Jakobson,
Fontanier établit un « modèle perceptif spatialisé » fait de
contiguïté (métonymie), d'intersection (synecdoque) et de
superposition (métaphore). Mais cette lecture un peu partisane et
soucieuse de fonder l'hégémonie de la métaphore a été récusée
par Gérard Genette, qui a réédité les deux ouvrages de Fontanier
sous le titre « Les
Figures du discours »
(1968), qui maintient l'égalité des trois types de figures,
effectivement autonomes pour l'auteur.
2.
La métonymie
est une figure qui
consiste à désigner un
objet par le nom d'un autre objet, existant séparément mais lié au
premier par une relation privilégiée, la cause pour l'effet,
l'instrument pour la cause, le contenant pour le contenu, le lieu
pour ce qui s'y tient ; par
exemple :
« Un
premier violon »
(dans
un orchestre)
renvoie au violoniste et non à l'instrument. C'est
un procédé rhétorique
qui consiste en un transfert de dénomination d'un mot (ou d'une
locution) à un autre, par un rapport de contiguïté (la cause pour
l'effet, rapport de matière à objet, le contenant pour le contenu,
le signe pour la chose signifiée, etc.). Exemples : « Il
a levé le coude toute la journée »
pour « Il a bu toute la journée », « Boire
un verre » pour
« Boire le contenu d'un verre ».
3.
La synecdoque
est une figure de style qui consiste à désigner
un objet par le nom d'un autre objet avec lequel il forme un
ensemble, l'existence de l'un se trouvant comprise dans l'existence
de l'autre. Par exemple :
« Croiser
le fer » (pour :
« Se
battre à l'épée »), « Le
seuil » (pour :
« la maison » ou « le foyer »).
Certains linguistes ont
unifié les deux notions de métonymie et de synecdoque, en
faisant de la synecdoque une métonymie
par extension, tant la
distinction entre ces deux figures est souvent ténue.
4.
La métaphore
est une figure de
rhétorique, un procédé de langage qui consiste dans un transfert
de sens (terme concret dans un contexte abstrait) par substitution
analogique.
Exemple
avec la locution « Prendre
racine » qui
signifie au sens propre « commencer
à se nourrir par les racines, après plantation ou transplantation,
s'enraciner, devenir fort
et vivace, s'implanter », en parlant d'un organisme végétal,
et au sens figuré en
parlant d'une personne « rester
debout et immobile », dans
« Les soupçons
avaient trop fortement pris racine dans l'esprit de quelques entêtés
ou de quelques philosophes pour être entièrement dissipés »,
extrait de : Le réquisitionnaire
(1831),
d'Honoré
de Balzac (Paris,
Gallimard, Collection La
Pléiade, 1950, IX,
p. 858).
La
métaphore est une
comparaison implicite (qui
n'admet pas de troisième élément introducteur
entre les deux éléments métaphoriques).
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Consigne :
construire des syllepses (ou réutiliser les syllepses
des exemples) et les insérer dans un court récit, ou bien à
l'inverse, composer un court récit en n'oubliant pas d'y introduire
quelques syllepses.
Avec
les syllepses suivantes :
-
Toute la nuit, j'ai écouté sur
mon MP3 « Le dernier jour » ; elle est vraiment très
belle,
où
« Le dernier
jour »
est le titre d'une chanson (mot féminin) auquel se réfère belle.
-
Se constituer une garde-robe et
une conduite personnelle et originale,
construite
sur le double sens (au propre et au figuré) du
verbe
se constituer.
-
Le
cosmonaute était au septième ciel, car il avait réussi à placer
sans encombre la navette spatiale en orbite autour de la terre ; il
regrettait seulement de ne pas y être en compagnie de sa femme,
construite
sur le sens propre et le sens figuré du mot ciel
(espace infini qui s'étend au-dessus de nous et dans lequel se
meuvent les astres, et, séjour de Dieu et des bienheureux).
-
Une
bande d'enfants s'éparpillèrent au milieu du public bien avant la
fin du concert,
où le verbe s'éparpiller
se conjugue avec le nom au pluriel enfants,
et non avec le nom au singulier bande,
afin de souligner le fait que la bande est constituée de nombreux
enfants.
Cela
pourrait donner ceci :
Notre
plaisir se troubla lorsqu'une
bande d'enfants s'éparpillèrent au milieu du public bien avant la
fin du concert. Pour
nous remettre de
ce désagréable
sentiment,
nous écoutâmes durant
le reste de la nuit et
sur
mon MP3 « Le dernier
jour »
; elle est vraiment très belle... cette
chanson...
Mon amie, qui n'était pas encore
ma
petite amie, s'était constitué pour l'occasion une garde-robe et
une conduite personnelle et originale : elle
n'avait
pas arrêté
de sourire durant
toute la soirée.
Etc.
Et maintenant...
À vous de jouer - et d'écrire,
À vos claviers, plumes et stylos !
À vous de jouer - et d'écrire,
À vos claviers, plumes et stylos !
.
¤ . ¤ . ¤
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Bibliographie
DUBOIS
(Jean),
GIACOMO (Mathée),
[et al.], Dictionnaire
de linguistique et des sciences du langage,
Paris, Larousse, 1999
(collection Expression), p.
460.
Encyclopædia
Universalis,
2008-2009,
édition numérique, 1
CD-ROM, articles
de
Robert
SCTRICK (Fontanier
Pierre),
de
Véronique
KLAUBER (Syllepse),
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Jean-Yves
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Le
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2ème édition,
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GREVISSE
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PEYROUTET
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nouvelle
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Montpellier, Réseau CRDP/CDDP (Centre Régional de Documentation
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Languedoc-Roussillon), [199-?], fiche
78.
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