samedi 2 avril 2016

Antonymes et épithètes

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L a – P U B L i a n c e
atelier d'écriture et publication
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Jeux autour des épithètes et des antonymes
GRACIEUSE ET PERCINET

Il y avait une fois un roi et une reine qui n'avaient qu'une fille. Sa beauté, sa douceur et son esprit qui étaient incomparables, la firent nommer Gracieuse. Elle faisait toute la joie de sa mère ; il n'y avait point de matin qu'on ne lui apportât une belle robe, tantôt de brocart d'or, de velours ou de satin. Elle était parée à merveille, sans en être ni plus fière ni plus glorieuse. Elle passait la matinée avec des personnes savantes qui lui apprenaient toutes sortes de sciences ; et l'après-dinée [l'après-midi], elle travaillait auprès de la reine. Quand il était temps de faire collation, on lui servait des bassins pleins de dragées, et plus de vingt pots de confitures : aussi disait-on partout qu'elle était la plus heureuse princesse de l'univers.
Il y avait dans cette même cour une vieille fille fort riche, appelée la duchesse Grognon, qui était affreuse de tout point : ses cheveux étaient d'un roux couleur de feu ; elle avait le visage épouvantablement gros et couvert de boutons ; de deux yeux qu'elle avait eus autrefois, il ne lui en restait qu'un chassieux ; sa bouche était si grande, qu'on eût dit qu'elle voulait manger tout le monde ; mais, comme elle n'avait point de dents, on ne la craignait pas ; elle était bossue devant et derrière, et boiteuse des deux côtés. Ces sortes de monstres portent envie à toutes les belles personnes : elle haïssait mortellement Gracieuse et se retira de la cour pour n'en entendre plus dire du bien. Elle fut dans un château à elle, qui n'était pas éloigné. Quand quelqu'un l'allait voir et qu'on lui racontait des merveilles de la princesse, elle s'écriait en colère : « Vous mentez, vous mentez, elle n'est point aimable, j'ai plus de charme dans mon petit doigt qu'elle n'en a dans toute sa personne ! »
Cependant la reine tomba malade et mourut. La princesse Gracieuse pensa mourir aussi de douleur d'avoir perdu une si bonne mère ; le roi regrettait beaucoup une si bonne femme. Il demeura près d'un an enfermé dans son palais. Enfin les médecins, craignant qu'il ne tombât malade, lui ordonnèrent de se promener et de se divertir. Il fut à la chasse : et, comme la chaleur était grande, en passant par un gros château qu'il trouva sur son chemin, il y entra pour se reposer.
Aussitôt la duchesse Grognon, avertie de l'arrivée du roi (car c'était son château), vient le recevoir et lui dit que l'endroit le plus frais de la maison, c'était une grande cave bien voûtée, fort propre, où elle le priait de descendre.
Le texte proposé est extrait de : Gracieuse et Percinet : conte (1697), de Mme d'Aulnoy (Paris, Garnier frères, 1882, p. 1).
Marie-Catherine Le Jumel de Barneville, comtesse d'Aulnoy* est une femme de lettres française (vers 1650-1705) du XVIIe siècle. Contrainte, pour avoir tenté de se débarrasser d'un époux de trente ans son aîné, et avec qui elle aura cinq enfants, à séjourner en Espagne où sa mère était devenue marquise de Gudane, puis en Angleterre (de 1669 à 1685), elle fit paraître en 1690 ses Mémoires de la cour d'Espagne, suivis de la Relation du voyage en Espagne, ouvrages qui sont la présentation, dans un style élégant et facile, des mœurs et de la vie politique et mondaine en Espagne à la fin du XVIIe siècle.
De retour en France en 1685, elle ouvrit un salon littéraire fréquenté par la société mondaine, et elle publia en 1690 un récit romanesque qui connut un immense succès et qui ne cessa d'être réédité au cours du XVIIIe siècle : Histoire d'Hippolyte, comte de Douglas, roman où se mêlent la réalité historique et la fiction, selon le modèle fourni par la Princesse de Clèves de Mme de La Fayette, paru en 1678.
Dans ses ouvrages, Mme d'Aulnoy y sacrifie déjà à la mode des contes de fées, apparue en France vers 1685 (les Contes de Jean de La Fontaine ont paru en 1665). On trouve dans la Relation du voyage en Espagne, « l'Histoire de Mira », variation sur le thème de Mélusine, et, dans l'Histoire d'Hippolyte, « l'Île de la Félicité », un conte très beau et très triste sur la fuite du temps**. De 1696 à 1698, elle publie huit volumes sous les titres des Contes de fées (« L'Oiseau bleu », « Gracieuse et Percinet », « La Chatte blanche », etc.), Contes nouveaux, Les Fées à la mode, Les Illustres fées, qui évoquent tantôt un univers où le merveilleux est très raisonnable et l'intention moralisatrice, tantôt, plutôt que l'univers du merveilleux, l'univers d'une société galante.
Marie-Catherine Le Jumel de Barneville exploita encore le goût de l'anecdote historique dans les Mémoires de la cour d'Angleterre (1695), celui du roman historique dans l'Histoire de Jean de Bourbon, prince de Carency, où abondent les exploits de pirates, captivités chez les Maures, délivrances romanesques, et dans le Comte de Warwick (1703).
L'œuvre de Mme d'Aulnoy valut à son auteur de figurer, sous les traits de Clio (la muse de la poésie épique et de l'histoire), parmi les neuf femmes de lettres élues par l'Académie des Ricovrati de Padoue, pour représenter les muses.
*Le Petit Robert des noms propres, nouvelle édition refondue et augmentée, 2007, p. 152.
**Dictionnaire des littératures de langue française, Jean-Pierre de Beaumarchais, Daniel Couty, Alain Rey, nouvelle édition mise à jour et enrichie, Paris, Bordas, 1994, 4 vol., t. 1, p. 114.
ANTONYMES
Un antonyme est un terme contraire à un autre terme de même nature : large/étroit, grand/petit, noirceur/blancheur, propre/sale, santé/maladie, ou défini par une relation de réciprocité (vendre/acheter, demander/répondre), ou de complémentarité (la négation de l'un des deux termes entraîne l'autre : masculin/féminin, marié/célibataire). Il est souvent difficile de distinguer les mots contraires des mots complémentaires et des mots réciproques, c'est pourquoi l'usage courant les réunit sous le nom générique d'antonymes.
Consigne 1 : remplacer chaque mot de l'extrait de texte proposé par son antonyme. Avec le premier paragraphe, cela pourrait donner ceci :
Il y avait une fois un roi et une reine qui n'avaient qu'une fille. Sa beauté, sa douceur et son esprit qui étaient incomparables, la firent nommer Gracieuse. Elle faisait toute la joie de sa mère ; il n'y avait point de matin qu'on ne lui apportât une belle robe, tantôt de brocart d'or, de velours ou de satin. Il y avait plusieurs fois, la dixième exactement, que l'ouvrier et sa femme avaient un garçon.
Sa laideur, sa rudesse et sa bêtise qui étaient comparables à celles d'un monstre, le firent surnommer Disgracieux. Il faisait un peu la tristesse de son père ; rare était les soirs où il retirait ses pantalons en toile de jute ternes et rêches. Elle était parée à merveille, sans en être ni plus fière ni plus glorieuse. Il était déformé par ses frusques qui le faisaient paraître commun, sans en être ni plus enthousiaste, ni plus honteux.
Elle passait la matinée avec des personnes savantes qui lui apprenaient toutes sortes de sciences ; et l'après-dinée [l'après-midi], elle travaillait auprès de la reine. Il demeurait plusieurs jours loin des choses bêtes qui lui faisaient oublier l'ignorance ; et pendant des semaines, il se reposait loin des ouvriers. Quand il était temps de faire collation, on lui servait des bassins pleins de dragées, et plus de vingt pots de confitures : aussi disait-on partout qu'elle était la plus heureuse princesse de l'univers. Pas de goûter, on lui refusait la moindre tasse d'huile de ricin, la moindre parcelle de pomme verte et acide : aussi disait-on partout qu'il était le plus malheureux domestique du village.
ÉPITHÈTES
En rhétorique, une épithète (nom masculin jusqu'au XVIIe siècle, le mot a ensuite changé de genre et il est devenu féminin) est une figure d'élocution, c'est-à-dire une figure qui s'intéresse au choix des mots convenant à l'expression de la pensée. Cette figure d'expression procède par l'extension d'un nom ou d'un pronom, en le qualifiant, et en changeant éventuellement le sens de ce mot, d'un groupe de mots ou d'une phrase.
Dans la grammaire française, une épithète est un mot qualificatif subordonné à un nom, qui peut être un adjectif ou un participe (éventuellement accompagnés de leurs éléments subordonnés). L'épithète n'est pas indispensable au sens, elle peut être supprimée sans que la phrase perde son sens premier.
Consigne 2 : introduire des épithètes dans l'extrait de texte suivant :
La Grognon attendait la nuit impatiemment. Dès qu'elle fut venue, elle fit mettre les chevaux à sa chaise roulante ; on obligea Gracieuse d'y monter, et sous escorte on la conduisit à cent lieues de là, dans une forêt où personne n'osait passer, parce qu'elle était pleine de lions, d'ours, de tigres et de loups. Quand ils eurent percé jusqu'au milieu de cette forêt, ils la firent descendre et l'abandonnèrent, quelque prière qu'elle pût leur faire d'avoir pitié d'elle. « Je ne vous demande pas la vie, leur disait-elle, je ne vous demande que la mort ; tuez-moi, pour m'épargner tous les maux qui vont m'arriver. » C'était parler à des sourds ; ils ne daignèrent pas lui répondre, et, s'éloignant d'elle à toute vitesse, ils laissèrent cette fille toute seule. Elle marcha quelque temps sans savoir où elle allait ; tantôt se heurtant contre un arbre, tantôt tombant, tantôt embarrassée dans les buissons ; enfin, accablée de douleur, elle se jeta par terre sans avoir la force de se relever.
Cela pourrait donner ceci :
La méchante et revêche Grognon attendait la nuit impatiemment. Dès qu'elle fut venue, elle fit mettre les chevaux à sa chaise roulante ; on obligea Gracieuse d'y monter, et sous une bonne et grosse escorte on la conduisit à cent lieues de là, dans une grande forêt ténébreuse, où personne n'osait passer, parce qu'elle était pleine de lions affamés, d'ours sauvages, de tigres féroces et de loups cruels et insensibles. Quand ils eurent percé jusqu'au milieu de cette horrible forêt brumeuse et frémissante, ils la firent descendre et l'abandonnèrent, quelque prière qu'elle pût leur faire d'avoir pitié d'elle. « Je ne vous demande pas la vie, leur disait-elle, je ne vous demande qu'une prompte mort ; tuez-moi, pour m'épargner tous les maux qui vont m'arriver. » C'était parler à des sourds, indifférents, apathiques ou impassibles ; ils ne daignèrent pas lui répondre, et, s'éloignant d'elle d'une grande vitesse, ils laissèrent cette belle et malheureuse fille toute seule. Elle marcha quelque temps sans savoir où elle allait ; tantôt se heurtant contre un arbre, tantôt tombant, tantôt embarrassée dans les buissons ; enfin, accablée de douleur, elle se jeta par terre sans avoir la force de se relever.
Consigne 3 : dans le texte obtenu après y avoir introduit des épithètes, remplacer ces épithètes par leurs antonymes. Cela pourrait donner ceci :
L'aimable et gentille Grognon attendait la nuit impatiemment. Dès qu'elle fut venue, elle fit mettre les chevaux à sa chaise roulante ; on obligea Gracieuse d'y monter, et sous une dérisoire et mauvaise escorte on la conduisit à cent lieues de là, dans une petite forêt lumineuse, remplie de lucioles et de vers luisants, où personne n'osait passer, parce qu'elle était pleine de lions rassasiés, d'ours domestiqués laissés en liberté, de tigres apprivoisés et de loups confiants et sensibles. Quand ils eurent percé jusqu'au milieu de cette merveilleuse forêt claire et tremblante, ils la firent descendre et l'abandonnèrent, quelque prière qu'elle pût leur faire d'avoir pitié d'elle. Etc.
Et maintenant...
À vous de jouer - et d'écrire,
À vos claviers, plumes et stylos !
L a – P U B L i a n c e
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mail : numencegalerielitteraire@gmail.com
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